Les sociétés modernes sont confrontées à des défis liés à l’équilibre entre le respect des libertés sociales et la préservation des traditions culturelles. Au cours d’une conférence publique, co-organisée par le Centre pour la Gouvernance démocratique (CGD) et le ministère chargé de la Culture, le mardi 18 février 2025, Dr. Hamidou Kader Aristide Nikiema, a défendu les traditions africaines en intégrant les libertés sociales.
La relation entre libertés sociales et traditions africaines n’est pas nécessairement antagoniste. C’est le postulat défendu par le Dr. Hamidou Kader Aristide Nikiema, dans son exposé sur les « Libertés sociales dans le contexte des traditions africaines ».

De l’avis du Dr. Hamidou Kader Aristide Nikiema, les libertés sociales visent à créer une société où chacun peut vivre librement et pleinement, tout en respectant les droits de l’autre. Cela, dit-il, est primordial pour garantir le développement harmonieux et inclusif d’une communauté.
Quant aux traditions africaines, il a indiqué que ce sont un ensemble de pratiques culturelles, sociales et spirituelles qui se transmettent de génération en génération. Elles englobent, poursuit-il, une variété de coutumes, de croyances, de rites et de modes de vie qui reflètent la diversité culturelle de l’Afrique. Des éléments clé des traditions africaines, il a cité l’oralité, les cérémonies et rites, la spiritualité et religion. Les traditions africaines qui sont vivantes, selon le conférencier, jouent un rôle crucial dans la cohésion sociale et l’identité culturelle des communautés africaines.
« Le lien entre les deux notions est complexe (liberté et traditions africaines, ndlr). Elles mettent en lumière comment les valeurs traditionnelles peuvent s’harmoniser avec les principes modernes des lois de l’homme et de la liberté individuelle : l’égalité, le respect mutuel, la transmission des connaissances, la liberté de religion. Tout en revendiquant les droits modernes, comme l’égalité des sexes, et la liberté d’expression, les sociétés africaines valorisent la communauté et la famille, influençant ainsi les notions de liberté personnelle », a-t-il expliqué.
Dr. Hamidou Kader Aristide Nikiema a souligné que les décisions communautaires souvent prises par les chefs et les anciens peuvent parfois restreindre les libertés individuelles en faveur de l’harmonie collective. Cela peut limiter la liberté d’expression et la capacité à participer pleinement à la prise de décision.
Ensuite, il a fait remarquer que les rites de passage et dogmes sociaux, tels que la circoncision, l’excision et l’initiation des guerriers jouent un rôle crucial dans la transmission des valeurs et des normes sociales. Ces pratiques sont souvent perçues comme des garde-fous contre la perte d’identité culturelle.
Toutefois, pour le Dr. Nikiema, il est possible de trouver un terrain d’entente entre libertés sociales et traditions africaines. Et cela passe, de son explication, par une société où traditions et libertés coexistent harmonieusement. Cela nécessite aussi, « un engagement de tous les acteurs sociaux, depuis les décideurs politiques jusqu’aux leaders communautaires », a-t-il insisté.
Une dédicace pour la paix !
Dans son livre, intitulé « Reconstruction et paix : comment au Burkina Faso concilier spécificité et universalité de l’idéal démocratique », dédicacé concomitamment à la conférence publique, le père Dr. Isidore Minougou a appelé à une réflexion profonde sur le mode de gouvernance souhaité par le peuple. En effet, le bouquin de 190 pages fait une rétrospective de la démocratie occidentale en Afrique.

Pour l’auteur, même si la jeunesse a tendance à critiquer la démocratie comme forme de gouvernance venant de l’Occident, c’est une valeur humaine qui ne vient pas de l’Occident. Dr. Minougou, cite, pour s’en convaincre les cultures africaines où il y a des pratiques et des valeurs qui cadrent avec la démocratie. Pour Isidore Minougou, l’idéal démocratique est fondé sur les principes de droits de l’homme, de justice sociale, de participation citoyenne et de séparation de pouvoir qui constituent des fondements essentiels d’un processus de reconstruction post-conflit. « L’ouvrage montre que tout ce que nous avons vécu ici, en réalité, ne peut pas être appelé des démocraties. C’est pour cela que cette Transition doit nous aider à réfléchir à quelle démocratie nous voulons pour vivre en Afrique aujourd’hui, ici et maintenant ! Cette période de Transition est une occasion, pour nous, de penser à notre démocratie pour un lendemain meilleur. Par exemple, le système éducatif qui ne cadre pas avec nos réalités, comment ne pas, en cette période, utiliser nos compétences locales pour réfléchir sur un système éducatif qui nous permettra de construire un Burkina Faso en adéquation avec nos aspirations ? », a souhaité le philosophe Dr. Isidore Minougou.
Par ailleurs, il a invité le gouvernement à prendre des initiatives de dialogue pour inculturer l’idéal démocratique.
Précisons que le livre est disponible sur le marché au prix unitaire de 14 500 F CFA.
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Mathias Kam et Nafissatou Dera (Stagiaire)
Minute.bf