Le Centre pour gouvernance démocratique (CGD) a initié une conférence publique, ce jeudi 23 mai 2024 à Ouagadougou. « Assises nationales : quel nouveau pacte républicain pour la sauvegarde du Faso ? », est le thème principal de cette conférence qui a réuni plusieurs personnages de la société burkinabè.
À l’entame de la conférence, le Pr Abdoulaye Soma, dans sa leçon inaugurale sur le thème central, a indiqué que les Assises nationales, prévues se tenir les 25 et 26 mai prochains, sont une opportunité à saisir. « Parce que le pays peut se stabiliser en fonction de ce qu’on dira et fera dans les assises ou soit le pays peut aussi péricliter en fonction de ce qui sortira de cette rencontre », a prévenu l’enseignant-chercheur, suggérant aux acteurs de sortir de « l’émotion » pour se laisser habiter par « l’objectivité scientifique, loin des objectifs personnels ». Pr Soma a souligné que les assises nationales ont besoin de liberté, de tranquillité, de sincérité et d’intégrité.
« Tout est pire qu’avant… »
Dans sa communication sur la « Conduite du processus de transition au Burkina Faso : acquis, insuffisances et perspectives », Kalifara Séré n’a pas été tendre avec le régime militaire en place. Pourtant, il a commencé, dans son propos, par relever des acquis dans la gouvernance du Capitaine Ibrahim Traoré. Pour lui, la Transition a des « initiatives louables, inédites et salutaires ». Il a cité, entre autres, le recrutement de 50 000 Volontaires pour la Défense de la Patrie (VDP), l’acquisition de matériels de guerre, des opérations terrestres, la création des Bataillons d’intervention rapide (BIR), les opérations conjointes avec le Mali et le Niger.
Cependant, il a fait remarquer que « l’arbre ne doit pas cacher la forêt ». Pour l’analyste politique, il faut redéfinir la tactique de guerre pour espérer de meilleurs résultats sur le terrain. Parce qu’à l’instant présent, a relevé M. Seré, « le bilan est marqué par le sceau de l’échec ». « Nous sommes dans une trajectoire de chaos. En matière de reconquête territoriale, la situation s’est aggravée. Tout est pire qu’avant… », a-t-il déploré.
En termes de cartographie pour arriver à bout de l’hydre terroriste, M. Seré a préconisé « 49 % de force militaire, 49 % de réconciliation nationale et 2 % pour la grâce de Dieu ».
Aussi, s’est désolé le communicateur du jour : « c’est un parjure de dire : on ne veut plus les élections. On ne veut plus les droits de l’homme ». Pour lui, « une autorité publique qui par sa bouche sort des propos anti-libertés publiques et anti-démocratie, cette autorité ne devrait pas être en fonction d’une seule arme. C’est un parjure ».
Reprenant le flambeau pour sa communication sur les « Assises nationales dans un contexte de crispation socio-politique : quel schéma opérationnel pour sortir le Faso de l’impasse ? », Dr Aboubacar Sango a insisté sur la nécessité de l’inclusivité et de la souveraineté.
Mais pour créer une situation normale, selon le Dr Sango, il faut d’abord que la normalité revienne au sommet de l’État. « Il faut d’abord rétablir le pouvoir constitutionnel. Pourtant le régime n’a rien fait pour organiser les élections », a-t-il dit. Dr Sango a demandé de rétablir l’Etat de droit, lever les suspensions des partis politiques et la restriction des libertés collectives et individuelles. Les assises nationales doivent être inclusives et participatives, a ajouté le paneliste.
Du reste, Aboubacar Sango a supplié les ancêtres pour qu’ils inspirent les Burkinabè, surtout Thomas Sankara, pour qu’il touche les cœurs de ceux qui ont en charge la gestion de l’appareil d’État afin que le Burkina Faso soit leur seule boussole dans la bataille. Il a souhaité qu’un climat de paix soit retrouvé avec la Côte d’Ivoire, car « Alassane Ouattara ne peut pas être un problème pour le Burkina Faso ».
Dr Sango, a même souhaité un discours officiel du président de la Transition avant les assises pour appeler à la décrispation.
Pire que l’apocalypse ?
Selon le Dr Aristide Béré, qui intervenait sur le thème « Les assises nationales : Comment recentrer les priorités et mobiliser les énergies pour les adresser ? », il est temps de se réveiller. Il a souhaité la mise en place d’un « collège de sages » pour s’approprier cette question de la vie de la nation. Sans quoi, a-t-il prévenu : « si tout le monde continue de se taire, ce ne sera pas l’apocalypse [qui nous guette], mais on ne verra même pas cette apocalypse ».
« Il faut arrêter les chansons de deuil. L’armée française est en Côte d’Ivoire, elle est la première puissance économique de l’UEMOA. L’armée américaine est en Allemagne, l’Allemagne est la première puissance économique de l’Union européenne. L’armée américaine est au Japon. Cela n’a pas empêché ce pays d’être une puissance économique. (…) À chaque fois qu’on n’a pas trouvé un moyen de dévolution du pouvoir, on a crié : à bas l’impérialisme et on a fini abattu. (…) Si on continue de dire Dieu bénisse le Burkina Faso, Amen ! Bon, ça ne sera pas facile », a-t-il lâché.
Enfin, « les implications juridiques et politiques du retrait de la CEDEAO sur le processus de transition : défis et perspectives ? », ont été décortiquées par le Pr Martial Zongo. D’après le Pr Zongo, le retrait de la CEDEAO a des implications juridiques atténuées sur le processus de la Transition et des implications politiques indéterminées.
Le communicateur est revenu sur les deux principales raisons qui ont causé le retrait du Burkina Faso de la CEDEAO, l’illégalité des sanctions et la non-assistance des pays confrontés à l’hydre terroriste. Mais ce retrait ne rend pas caduque l’engagement au retour à l’ordre démocratique vu que le Burkina Faso reste formellement lié au protocole sur la démocratie et la bonne gouvernance, a confié le Pr Zongo.
En rappel, les assises nationales devant statuer sur la suite de la Transition ont été convoquées pour les 25 et 26 mai 2024 à Ouagadougou.
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Mathias Kam
Minute.bf