Le procès Adama Siguiré s’est ouvert dans la matinée ce lundi 26 février 2024, au tribunal de grande instance Ouaga 1. Dès l’ouverture de l’audience et après que le tribunal ait notifié les charges retenues contre le prévenu, les avocats de la défense ont relevé des irrégularités dans la procédure de saisine de leur client. Ils évoquent notamment un « faux incident ».
Selon la Défense, les quatres actes de citation à comparaître de la CGT-B n’ont pas été délivrés en main propre à Adama Siguiré par l’huissier qui les a émis, mais plutôt par un juriste exerçant au sein du cabinet de ce dernier. Ce juriste, dit-elle, n’a pas l’habilitation nécessaire pour suppléer l’huissier dans une telle démarche parce que n’étant pas assermenté. Cette procédure qui, selon la Défense, n’est pas conforme aux dispositions du code de procédure civile, rend nulle la saisine parce que « les actes sont d’office considérés comme faux »
« Nous avons des actes qui eux-mêmes sont authentiques parce que portant la signature et le cachet de Me Martin Nikiema qui est effectivement un huissier. Mais, compte tenu du fait que ce n’est pas l’huissier lui-même qui s’est rendu chez M. Siguiré pour lui signifier ces actes et que c’est une autre personne qui l’a fait alors qu’elle n’a pas qualité pour le faire, nous nous demandons quelle est la nature juridique de tels actes? Nous disons que ces actes sont nuls. Étant donné que ces actes sont nuls, nous disons que la saisine également est nulle », a déclaré la défense.
Du reste, la défense affirme avoir demandé à l’huissier de fournir la preuve que le juriste qui a remis l’acte à leur client est assermenté pour le faire. Mais, elle dit n’avoir pas encore reçu cette preuve jusqu’à ce jour.
Les avocats ont, en outre, versé des images de vidéosurveillance de l’arrivée dudit juriste dans le bureau de Adama Siguiré pour lui remettre les actes. Ils ont donc demandé au tribunal de surseoir à la procédure en cours, conformément à l’article 182 du code de procédure civile, en attendant que l’huissier de justice fournisse la preuve demandée.
Les avocats de la CGT-B ont battu en brèche cette irrégularité relevée par la défense. Ils ont relevé que la disposition du code de procédure civile invoquée n’est pas valable ici parce qu’elle n’intervient uniquement qu’en matière commerciale et sociale. Alors que dans le cadre de ce dossier, l’on est dans un cadre correctionnel. « Le code de procédure civile s’exclue lui-même ici », a martelé la partie civile.
Les avocats de la CGT-B ont également remis en cause l’authenticité des images de vidéosurveillance versées au tribunal. Ils ont demandé à Siguiré s’il a reçu une autorisation préalable de la Commission de l’informatique et des libertés (CIL) avant d’installer des caméras dans les locaux de son entreprise. « Je ne répondrai pas à cette question », a répondu le prévenu.
La partie civile en a conclu que les appareils de vidéosurveillance de Siguiré ont été installés de façon irrégulière et a demandé au tribunal de ne pas tenir compte des pièces qui lui ont été versées par la défense à ce propos. « Nous sommes en matière pénale. Il est même passible de poursuites. Mme le procureur, voici quelqu’un qui est venu se jeter entre vos mains », a martelé la partie civile.
Et Me Prosper Farama de soutenir à ce propos : « Ce qui compte le plus ici c’est le signataire et non celui qui a remis l’acte » et de trancher : « trêve de bavardage ! On demande à M. Siguiré de venir nous dire où la CGT-B a reçu de l’argent pour déstabiliser la transition. C’est tout ce qu’on demande ».
Le parquet a abondé dans le même sens que la partie civile. Il a indiqué que l’exception de nullité ne peut être soulevée que lorsque l’acte jugée irrégulière porte atteinte aux droits de la partie concernée. Dans le cas d’espèce, selon le procureur, l’acte jugé faux ne porte aucunement atteinte aux droits de la défense. Il a de ce fait demandé au tribunal de rejeter leur demande.
Pour le parquet, il y a confusion entre les notions d’irrégularités et de faux. Il s’agit ici d’une irrégularité, selon lui, et non d’un faux. Irrégularité, parce que ce n’est pas l’huissier qui est allé remettre l’acte mais plutôt un juriste de son cabinet. « Nous sommes dans une situation où le cabinet existe. Les actes ont été bel et bien signés par un cabinet qui existe et qui est reconnu comme tel . Si le cabinet n’existait pas, là il y aurait problème. Mais le cabinet existe et donc ici l’acte en lui-même n’est pas faux », a expliqué le procureur.
L’audience est suspendue pour être reprise dans une heure.
Lire aussi ➡️ Justice : Voici les chefs d’accusation retenus contre l’écrivain Adama Siguiré
Oumarou KONATE
Minute.bf