mercredi 11 décembre 2024
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Traditions et coutumes : « C’est très dangereux de s’adonner à des rites qu’on ne maîtrise pas » (Bendnaaba de Gounghin)

A l’occasion de la célébration de la Journée nationale des Coutumes et Traditions (JCT), le Bendnaaba de Gounghin, Chef des tambours de la Cour du Mogho naaba, également président de l’association Id-Singré, a donné une communication sur le thème : « Naab-a Zid-wendé neb paga tenga ou l’osmose des croyances des gens de la terre et des gens du pouvoir ». C’était dans l’enceinte du palais du Mogho Naaba à Ouagadougou.

Dans sa communication, le Chef des tambours s’est d’abord livré à une définition du concept de tradition. La tradition, selon ses explications, renvoie aux faits et pratiques culturelles que l’on trouve dès sa naissance dans sa communauté d’appartenance. « La tradition peut être personnelle. Ça peut découler de ce que ton papa faisait. Quelqu’un peut dire : moi je suis né trouver que mon papa faisait ci, il faisait ça. Donc, moi aussi je vais le faire. C’est une tradition. Ça peut être aussi familial. C’est-à-dire que ta famille faisait telle chose et toi-aussi tu décides de la perpétuer. La tradition peut être aussi à l’échelle du village », a-t-il détaillé.

Il a poursuivi ses explications en ajoutant qu’une pratique traditionnelle peut être abandonnée par une communauté donnée à un moment de son histoire, si elle la juge dépassée. Toutefois, a précisé le Bendnaaba, l’abandon de certaines traditions n’est pas sans conséquence. Pour être « éteintes », il y a des pratiques traditionnelles qui demandent des sacrifices et même des sacrifices humains. « Il y a des traditions qu’on ne peut pas abandonner sans conséquences. Pour être abandonnées, certaines traditions nécessitent forcément que le doyen de la famille où le chef de la famille se sacrifie. Il peut juger que vu l’évolution du temps et des habitudes, certaines pratiques doivent être abandonnées. Et là, il sacrifie sa vie pour que le reste des membres de sa famille soit épargné de cette pratique. C’est l’exemple du mariage traditionnel en pays Moaga. Vous savez que le mariage traditionnel relève de la pure tradition. C’est sacré. Il se trouve qu’avant, on donnait un coq ou un bélier pour le mariage. Ce coq qui était demandé était utilisé pour des rites. Les anciens rentraient dans la case des mânes pour leur dire que dès aujourd’hui, ils unissent leur fille à telle personne ou tel village où telle famille. C’est donc un pacte qu’ils signent avec les ancêtres. Et la fille qui est ainsi donnée en mariage est tenue de rester chez son mari quoi qu’il advienne. Ça veut dire que quand la fille part ainsi, si quelque chose arrive entre elle et son mari, elle ne peut même plus revenir dans sa famille. Sa famille ne peut plus reprendre sa main. C’est comme si on l’a bannie de la famille. De nos jours, avec les divorces qui surviennent à tout bout de champ, les vieilles personnes ont vu qu’il serait difficile pour cette génération de respecter les liens sacrés du mariage. Certains parmi eux ont donc décidé de sacrifier leur vie devant les mânes pour que cette tradition s’arrête », a-t-il expliqué.

Pour le Conférencier, les traditions sont le socle de toute Communauté. Elles sont selon lui, le vecteur par excellence de la réconciliation des peuples. « Tout le monde est traditionaliste. Même les religions sont devenues traditions pour nous parce que ce sont nos ancêtres qui les ont acceptées. Alors aujourd’hui, ces religions-là font partie de nos traditions. Quand vous prenez la sortie de Sa Majesté (le Mogho naaba), vous allez voir les Yarsé qui s’en vont faire allégeance. Ils sont venus de la Mecque. Vous verrez dans le royaume Mossi des Pafadnam qui sont des Marensé, des Silmiisi qui sont tous venus d’ailleurs, les Setba. Ils sont venus d’ailleurs mais sont dans la cour royale. Chacun d’eux a ses rites qu’il fait dans la Cour royale. La tradition est un ensemble. C’est un vivre-ensemble », a-t-il soutenu.

Le Bendnaaba de Gounghin

Le chef des tambours de la Cour du Mogho naaba n’a pas manqué, au cours de sa communication, de mettre en garde les personnes qui, dans la ferveur des festivités, se livreraient à des rituels qu’ils ne maîtrisent pas. A l’en croire, les ancêtres ne font pas dans le m’a tu vu. Les rites sont sacrés et leurs pratiques sont uniquement réservées aux initiés. « On ne fait pas les rites pour se faire voir. Les rites sont faits par personne, par communautés et aussi par des doyens qui s’y maîtrisent. Tu ne peux pas être un fils dont le père est encore en vie et te lever prendre de l’eau pour invoquer les ancêtres. Parce que dans nos traditions , si ton papa est encore en vie, tu es étranger à l’au-delà. C’est lorsque ton papa meurt que tu es autorisé à invoquer les ancêtres. Et là tu commences d’abord par invoquer ton papa. C’est lui qui intercède auprès des ancêtres pour toi. Mais si des gens se lèvent pour faire des invocations à tout vent, c’est très dangereux. C’est très dangereux de s’adonner à des rites qu’on ne maîtrise pas. Ces pratiques sont réservés à des initiés spécifiques. Dans chaque village, il y a des gens, des familles qui sont dédiés à cela. Ce sont les sacrificateurs. Tu ne peux pas ne pas être chef de terre et demander à la terre. A Ouagadougou ici par exemple, il y a le Chef de terre. Même le Mogho naaba quand il a besoin d’invoquer la terre, il y a des gens désignés pour ça. Chacun connaît sa mission », a-t-il sensibilisé.

Le Bendnaaba de Gounghin s’exprimait à l’occasion de la cérémonie de commémoration de la Journée des Coutumes et traditions organisée par le Royaume de Ouagadougou ce mercredi 15 mai 2024.

Oumarou KONATE

Minute.bf

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