jeudi 19 juin 2025
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Demande de pardon de Blaise Compaoré : « En tant que Mousbila, je laisse passer » (Mousbila Sankara)

Mousbila Sankara, 78 ans, est un proche de la famille de Thomas Sankara, parce qu’il était l’oncle du Père de la révolution assassiné le 15 octobre 1987. Ce mardi 26 juillet 2022, Blaise Compaoré à travers des émissaires dépêchés par le président ivoirien Alassane Dramane Ouattara, a adressé une lettre au président du Faso dans laquelle il « demande pardon au peuple burkinabè » et à la famille de son « frère et ami Thomas Isidore Noël Sankara ». Contacté par Minute.bf, Mousbila Sankara, ancien ambassadeur du Burkina Faso sous la révolution, qui a « beaucoup subi » après la mort de Sankara parce qu’ « emprisonné et torturé pendant 4 ans », dit ne pas refuser la main tendue par Blaise Compaoré. « S’il y a une main qui m’est tendue, moi je la tiens », a-t-il tranché. Mais il a pris le soin de préciser que cette décision est personnelle et n’implique pas la famille Sankara.

« Je vais vous dire exactement ma conception de la chose, en tant qu’individu. Je ne parle pas au nom de la famille (Sankara). Comme vous l’avez constaté, ce n’est qu’aujourd’hui que la lettre a été rendue publique. 

N’ayant pas été touché au préalable, je me dis que je devrais me tenir de commenter de façon générale sans avoir au préalable consulté les autres membres de la famille. Mais en tant qu’individu ayant côtoyé Thomas, Blaise et ayant subi ce que j’ai subi (après l’assassinat de Thomas Sankara, ndlr.), dans le principe, culturellement je ne peux pas refuser un pardon, c’est interdit dans notre religion et dans notre éducation. 

Maintenant, dans le contexte actuel, Blaise n’ayant pas voulu répondre au tribunal, a-t-il changé d’avis ou quelle est sa conception de ce pardon ? Du moins, il s’est adressé comme cela ; il parle au chef de l’Etat burkinabè pensant parler à l’ensemble du monde ou bien il s’adresse à ceux qui, individuellement, ont subi quelque chose ? Moi, j’ai été torturé par ses services, j’ai été enfermé pendant 4 ans, j’ai perdu tout ce que j’avais comme matériels. Aujourd’hui, si on demande pardon comme cela, ça s’arrête au décès de mon neveu Thomas (…) Je pense que les populations du Burkina Faso et celles d’Afrique et d’ailleurs, m’ont aidé à supporter tout cela, c’est-à-dire que la compassion du public et ce que j’ai pu entendre au tribunal, je peux laisser passer et accepter son pardon parce que nous sommes tous responsables, lui Blaise, moi, autant que les autres. Parce que sous le Conseil national de la Révolution (CNR), Thomas Sankara n’était pas chargé de sa propre sécurité. Sa sécurité avait été assurée par presque tout un corps, et si on reproche quelque chose, c’est à nous autres acteurs de la révolution qui n’avions pas pu travailler à éviter cela alors qu’on aurait pu manœuvrer pour éviter tout cela.

Je suis autant responsable que (Blaise Compaoré), même s’il y a des degrés divers. S’il y a une demande de pardon, je saisis la main, mais en tant qu’individu. Pour le reste, au niveau de la famille, comme la lettre semble bien la particulariser, il faudra une autre approche. Mais en tant que Mousbila, je laisse passer parce que je suis autant fautif que Blaise, pour n’avoir pas pu voir venir et éviter la tragédie qui a couté la vie, non seulement à Thomas, mais aussi à un grand nombre de ses partisans. Parce qu’après la mort de Thomas, beaucoup de personnes ont souffert, d’autres sont mortes pour avoir été soupçonnées d’être du côté de Thomas. Je ne suis pas mort mais j’ai aussi souffert car j’ai beaucoup subi. Je ne peux pas parler à la place de tout le monde. Mais en tant que Mousbila, je laisse passer.

Blaise a aussi souffert, parce que pour être ce qu’il est après ce qu’il a été, ce n’est pas bien ; jusqu’à quémander la permission pour rentrer dans un pays où tu en fus le président pendant des années, tout cela, je crois que Dieu a réglé la chose, moi je ne m’en mêle plus. S’il y a une main qui m’est tendue, moi je la tiens.

Mais Thomas Sankara a laissé une veuve, des frères consanguins, des sœurs, c’est vers ceux-ci qu’il faut voir. J’ai 78 ans, si je ne sais pas de quoi est faite cette vie sur terre, c’est que je n’aurais pas aussi appris grand-chose. »

Propos recueillis par A. Kinda

Minute.bf

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