vendredi 13 décembre 2024
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Burkina : « Même en contexte de guerre, la liberté de la presse doit être respectée » (Ali Sanou/MBDHP)

13 décembre 1998-13 décembre 2023. Cela fait 25 ans que le journaliste Norbert Zongo et ses 3 compagnons ont été assassinés. Pour commémorer cet anniversaire sombre, un panel a été organisé par le Collectif des organisations démocratiques de masse et de partis politiques (CODMPP) et la Coalition nationale de lutte contre la vie chère, la corruption, la fraude, l’impunité et pour les libertés (CCVC) sur le thème : « Respect des libertés et promotion de la bonne gouvernance comme facteurs de résilience dans le contexte actuel de crise sécuritaire ». Les panelistes ont unanimement soutenu qu’il faut préserver les droits humains et lutter contre la corruption pour un Burkina Faso de paix.

Depuis 2015, le Burkina Faso connait une crise sécuritaire liée au terrorisme. Cette crise a évolué et entraîne des « violations des droits humains ». Ali Sanou, Secretaire général (SG) du Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples (MBDHP), communiquant sur le sous-thème : « Respect des droits humains et libertés : principes fondateurs et réalités actuelles », a déploré cette situation.

Ali Sanou, SG du MBDHP

Pour M. Sanou, il n’y a pas que les actes étatiques qui doivent être dénoncés par les organisations de défense des droits humains, comme étant des atteintes aux droits humains. Les actes terroristes contre les populations civiles et les Forces de l’ordre constituent aussi, « une violation grave et inacceptable aux droits humains ». Les droits humains, définit-il, sont des droits que tout être humain possède simplement du fait de la vie. Ces droits humains ont un certain nombre de principes-fondateurs dont l’un est le respect de la dignité humaine qui veut que, tout être humain, quelles que soient les circonstances, soit respecté en tant qu’être humain et sa dignité sauvegardée. Et dans ce sens, Ali Sanou a indiqué que le terrorisme ne vise autre objectif que la destruction de l’État, notamment dans sa forme actuelle, en s’attaquant à tous les principes des droits humains.

Cependant, poursuivant dans sa communication, M. Sanou a insisté sur le fait que le terrorisme ne dispense pas l’État du respect des droits humains. Cela, même pas au nom de la lutte contre le terrorisme. Il revient donc à l’État d’éviter, selon lui, des détentions arbitraires et l’atteinte au droit à la vie.

Le SG du MBDHP a soutenu, en sus, qu’il « est interdit de tuer arbitrairement, par des exécutions sommaires et extrajudiciaires ». « A priori, lorsque l’État réagit face à une attaque terroriste et que l’action de l’État crée mort d’hommes, ça ne veut pas dire qu’il y a eu violation des droits humains », a-t-il notamment clarifié, faisant noter que cette même action constitue une atteinte aux droits humains, s’il s’agit d’une « bavure sur des civils ». Et pour ne pas que ces situations surgissent, il est de la responsabilité de l’État de mettre tout en œuvre pour que les Forces de défense et de sécurité (FDS) travaillent de façon professionnelle et ne posent pas des actes contraires à la loi.

Toutefois, le communicateur a déploré le fait que la réalité soit toute autre sur le terrain. « On constate dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, des détentions arbitraires de citoyens, le délit de faciès, la privatisation de la liberté d’expression et de presse, de la liberté d’opinion et de manifestations », a fait remarquer M. Sanou qui dénonce : « ces restrictions du fait de la situation de guerre sont illégitimes, parce que même en contexte de guerre, la liberté de la presse doit être respectée. Les médias doivent pouvoir informer le citoyen qui dispose toujours de son droit à l’information même en temps de guerre ».

De même, pour lui, « il est clair que les réquisitions constatées ces derniers jours sont arbitraires dans le contexte actuel où elles sont menées d’autant plus qu’il y a une réserve de 40 000 Volontaires pour la défense de la patrie ». « Ces réquisitions sont une atteinte à la liberté de presse, d’expression et d’opinion, et même constituent une banalisation de la guerre », a-t-il fustigé.

Pisyamba Ouédraogo, secrétaire exécutif adjoint du REN-LAC

Tous ces agissements montrent qu’au Burkina Faso, « il y a violation des droits humains aussi bien du côté de l’État que du côté des terroristes », a regretté Ali Sanou.

Le terrorisme vit par la corruption…

Selon Pisyamba Ouédraogo, secrétaire exécutif adjoint du Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC), la corruption et la lutte contre le terrorisme sont intimement liés et s’entretiennent mutuellement. De ce postulat, il considère qu’on ne peut faire l’économie du combat de l’un au profit de l’autre. « Comment se fait-il que, les groupes armées terroristes résistent depuis 2015 ? », s’est interrogé le paneliste. Pire, a-t-il poursuivi, de plus en plus, ces terroristes ont des moyens financiers, des armes et des moyens roulants. « Cela veut dire qu’il y a une source d’alimentation. Cette source ne peut être que la voie de la corruption et la contrebande », est-t-il convaincu.

Pour cela, M. Ouédraogo a suggéré que, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, « il y ait de sérieuses mesures pour lutter contre la corruption ». Cela, dit-il, a été le combat mené par feu, le journaliste Norbert Zongo.

Du reste, Pisyamba Ouédraogo a lancé un appel aux organisations de lutte contre la corruption, aux populations, chacun dans sa sphère de responsabilité, à dénoncer les actes de corruption pour efficacement lutter contre le terrorisme, afin de « rendre fier Norbert Zongo ». « La résolution des problèmes actuels de notre pays passe par la lutte contre la corruption et ensuite par la lutte contre le terrorisme. Que chacun prenne conscience du danger et de la menace que représente la corruption pour notre pays », a lancé le secrétaire exécutif du REN-LAC.

Plusieurs centaines de personnes ont pris part au panel

En somme, pour Pisyamba Ouédraogo, « le peuple doit prendre son destin en main ». « Nous sommes dans une société en pleine crise. Notre société est profondément en dégradation. Cela veut dire qu’il faut une rupture totale avec notre société actuelle. C’est avec cette rupture que nous pourrons retrouver les valeurs que nous avons perdues. C’est sur cette base que nous pourrions vaincre l’impunité et les injustices. Il faut qu’on trouve une société où tous les Burkinabè sont égaux devant la loi et devant la nourriture. Il faut qu’on accède aux choses de la vie. C’est cette société qu’il nous faut. Pour cela, le peuple doit se mobiliser, s’organiser pour demander des comptes à l’État », a-t-il conclu.

Lire aussi ➡️ Burkina : Un buste de Norbert Zongo dévoilé au Centre presse national 25 ans après son assassinat

Mathias Kam

Minute.bf

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