mercredi 11 décembre 2024
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Burkina : « Nous ne  pourrons pas attendre que la situation sécuritaire soit à 100% avant d’organiser des élections » (Pr Abdoulaye Soma)

A la faveur d’un dialogue démocratique organisé par le Centre pour la Gouvernance Démocratique (CGD), le Pr Abdoulaye Soma, enseignant de Droit dans les Universités, par ailleurs, député à l’Assemblée législative de transition, a animé, ce mardi 04 juillet 2023, une communication sur la situation sociopolitique et sécuritaire actuelle du Burkina Faso. Dans son analyse, le conférencier a soutenu que la question de l’organisation des élections ne doit pas être indexée à la sécurité nationale. 

Pour le député ALT qui s’exprimait sous sa coupe de scientifique ce mardi, la transition actuelle s’est engagée à l’accomplissement de trois (03) principales missions conformément à l’article 02 de la Charte de la transition. Ce sont essentiellement la sécurité nationale, les réformes nationales et la question du retour à un ordre constitutionnel avec l’organisation d’élections.

Intervenant sur la première et principale mission (la sécurité nationale), le conférencier a dit noter des avancées significatives en ce qui concerne la reconquête du territoire national. Il a fondé son analyse sur les déclarations du Premier ministre face à la représentation nationale quand il a affirmé que 65% du territoire national sont passés sous le contrôle des Forces armées nationales. À cela s’ajoute également, d’après M. Soma, le renforcement de la logistique militaire du pays. « On doit reconnaître les progrès qui ont été réalisés par le gouvernement du Burkina Faso (…) Mais objectivement, le souhait de tout Burkinabè est qu’il n’y ait plus d’attaques au Burkina. Ce qui n’est pas le cas actuellement. Les attaques se poursuivent, certaines moins graves, d’autres plus graves », a-t-il relativisé, invitant les autorités à plus d’efforts.

En rapport, avec le second point sur lequel s’est engagée la transition burkinabè, à savoir l’organisation des élections, Pr Abdoulaye Soma a invité les autorités à avoir « un comportement responsable et une réaction qui respecte [leurs] engagements ». Pour lui, on ne peut pas parler de report des élections si on met de côté les engagements que le Burkina Faso a pris avec les institutions internationales, en l’occurrence ici, la CEDEAO. « Nous avons dans la charte de la transition mis un délai pour la transition. Nous avons également acté ce délai dans un accord avec la CEDEAO et ce délai est en juillet 2024. Ce qui suppose qu’aujourd’hui, jusqu’à preuve du contraire, on a des élections en 2024 et on devrait les avoir. Maintenant, dans l’accord avec la CEDEAO, il a été intégré des critères d’évaluation de la Transition qui permettrait de décider quand la transition peut finir. Et parmi ces critères, il y a des critères de réformes, des critères portant sur la sécurité », a-t-il affirmé. Il a poursuivi en ajoutant que s’il advenait que la situation nationale commande le report de ces élections, les choses devraient se faire dans le dialogue et la concertation, non seulement avec la CEDEAO mais aussi avec les forces vives de la nation. « Si au niveau national, on remarque que l’un de ces critères n’est pas rempli pour la fin de la transition, il y a lieu d’engager le dialogue avec les acteurs concernés et les acteurs concernés sont de deux types ici. Il y a la CEDEAO pour modifier les accords avec la CEDEAO et les forces vives de la nation pour modifier la Charte de la Transition. Donc on ne peut pas juste proclamer ainsi qu’on ne fera pas d’élections en laissant de côté des engagements qu’on a pris dans des instruments toujours valables, ce n’est pas raisonnable. Si on veut faire bouger ces engagements, il faut le faire à travers la modification des accords qu’on a pris dans les actes cités. C’est ça, le comportement responsable à avoir », a-t-il soutenu. 

Des hommes politiques étaient présents au dialogue initié par le CGD sur la situation sociopolitique et sécuritaire du Burkina Faso

A l’en croire, vouloir agir en porte-à-faux avec ces accords risquerait de créer des circonstances aggravantes à la situation actuelle. 

Poursuivant son analyse, l’enseignant des Sciences juridiques a affirmé qu’il serait cependant une erreur d’indexer l’organisation des élections à la sécurité nationale. De son point de vue, la situation sécuritaire nationale ne peut pas être le baromètre pour décider de l’organisation ou pas des élections. Il a expliqué sa position par le fait que la situation sécuritaire que traverse le Burkina Faso n’a pas une durée déterminée. « Quand on écoute et on lit la déclaration faite par le Premier ministre (à l’ALT, ndlr), l’organisation des élections est indexée à la sécurité nationale. Il y a ici un problème majeur ! Ce fait risque de créer d’autres problèmes plus grands tant au niveau national qu’international », a-t-il indiqué, en avançant le fait qu’il est possible d’organiser des élections dans un État en crise. « On a pu avoir des élections dans des États qui sont impactés par une crise sécuritaire comme celle du Burkina. Nous venons d’assister à des élections au Nigéria qui est aussi traversée par une crise majeure qu’est le terrorisme. Au Mali voisin, avec lequel nous partageons beaucoup de choses en commun, il y a eu la tenue d’un référendum. Et même chez nous ici en 2020, on a réussi à tenir les élections (…) Nous ne pourrons pas vouloir attendre que la situation soit à 100% avant d’organiser des élections », a-t-il postulé.

Pour ce qui est de la mission des réformes, le communicateur du jour s’est réjoui de la dynamique de la transition actuelle et des réformes qui sont en train d’être entreprises. Selon lui, les périodes de transition sont les plus propices pour entreprendre de grandes réformes, en ce sens que ce sont des contextes « d’indéterminisme institutionnel et de neutralité partisane ». « C’est une situation favorable à la réussite des réformes. Parce que, quand on est dans une situation de déterminisme institutionnel, on sait déjà qui est le Président et, c’est humain, il n’est pas possible que le Président prenne des réformes qui impactent sa propre personne. La neutralité partisane suppose que ce n’est pas un parti politique qui pilote les réformes, et les périodes de transition sont les mieux indiquées parce que les transitions sont apolitiques et neutres », a justifié celui qui dit avoir toujours plaidé pour des réformes en période de transition.

Outre le Pr Abdoulaye Soma, le Pr Abdoul Karim Saidou, Dr Kassem Salam Sourwema et Dr Aboubacar Sango ont également donné leur lecture de la situation nationale.

L’organisation d’un tel dialogue démocratique découle de la volonté du Centre pour la Gouvernance Démocratique de de poser le débat sur la situation sociopolitique et sécuritaire du pays. « Comme vous le savez nous sommes dans un processus de transition, et dans la conduite du processus, il n’y a pas mal d’engagements qui sont prévus à la fois dans la charte de la transition mais aussi dans les différentes déclarations de politique générale. Au regard de ce processus, nous avons estimé qu’il fallait poser ce dialogue démocratique autour de la situation sociopolitique et sécuritaire du Burkina Faso », a confié Asseghna Anselme Somda, chargé de programme du CGD.

Soulignons que l’activité a connu la présence de responsable de partis politiques, de leaders d’opinion et de responsables d’organisation de la société civile.

Oumarou KONATE

Minute.bf

1 COMMENTAIRE

  1. Pertinent. Quand ceux qui sont sensé organiser les élections sont ceux qui doivent sécuriser (le gouvernement). S’il veut laisser les élections et rester au pouvoir toujours sous prétexte de sécurité encore, y’a problème. Puisque tout se trouve dans leur main.

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