A l’occasion de la commémoration des 40 ans de la révolution burkinabè, le Centre culturel Thomas Sankara a convié le public burkinabè à une projection du film « Les orphelins de Sankara » dans la soirée du 04 août 2023 à Ouagadougou. L’évènement a connu la présence d’anciens « orphelins » de Cuba qui ont séance tenante, interpellé les autorités de la transition actuelle sur leur situation.
En 1986, 600 enfants orphelins et ruraux du Burkina-Faso âgés entre 12 et 15 ans, sont envoyés à Cuba. Ils ont pour mission d’apprendre un métier et revenir développer leur pays en pleine révolution. Mais, lorsque le président d’alors, le Capitaine Thomas Sankara, est assassiné en 1987, le régime de Blaise Compaoré suspend sa part dans la contribution aux frais de scolarité des élèves. Le président cubain, Fidel Castro, décide de les laisser poursuivre leur formation. De retour au Burkina Faso, après leur formation, plusieurs parmi eux ont eu des difficultés à s’intégrer.
Le film documentaire « Les orphelins de Sankara » retrace à travers des témoignages, le parcours de ces jeunes orphelins devenus maintenant des adultes, leurs moments de joie à Cuba et les difficultés auxquelles ils ont été confrontés à leur retour au pays. C’est un film documentaire de 84 minutes réalisé par la réalisatrice française Géraldine Berger.
La projection de ce film, le 04 août 2023, vise selon les premiers responsables du centre Thomas Sankara de Ouagadougou, à revisiter un pan de l’histoire du père de la révolution Burkinabè, Thomas Sankara. L’objectif principal étant selon Abdoul Salam Koussoubé, Chargé de communication du CTS, d’inciter la jeunesse burkinabè à s’inspirer de la vision du Président Thomas Sankara. « On projette le film à un moment assez important de notre histoire socio-historico-politique, avec les chamboulements qu’on observe ça et là dans la sous-région. Je crois qu’il y a plus que jamais la nécessité pour nous de se rappeler la vision que Sankara a eue pour l’Afrique, pour le Burkina et tous les chantiers de développement qu’il a ouverts à travers son combat pour l’éducation. Il s’agissait donc pour nous de rappeler une bonne pratique de Thomas Sankara qui consistait à partir chercher le savoir partout où il est, comme nous l’a enseigné feu Cheick Anta Diop. Et je crois que Sankara a marché sur cette voie », a-t-il déclaré.
Présent à cette projection, le représentant de l’Ambassade de Cuba au Burkina Faso, Alexis Pena Orozco, Chargé d’affaires, a salué l’initiative du Centre Thomas Sankara. Il a en outre exhorté les peuples africains à s’inspirer de l’exemple d’amitié, de solidarité et de coopération qui liait le président Thomas Sankara au président cubain Fidel Castro. « Au delà d’être une amitié entre deux Chefs d’État, c’était une amitié de père à fils. Quand il y a eu le coup d’État de Blaise Compaoré, ces enfants ont été laissés à eux-mêmes mais vous avez vu que Fidel Castro a refusé qu’ils soient rapatriés et il a dit qu’ils vont rester à Cuba et que c’est lui qui va s’en occuper. Et cela malgré le fait que Cuba était un pays bloqué, un pays pauvre. Aujourd’hui moi je suis fier quand j’entends ces enfants parler de Fidel Castro et Thomas Sankara comme leurs pères. Pour moi, ça c’est vraiment une fierté quand on sait que beaucoup de médias ont passé le temps à presenter Fidel Castro comme un dictateur et tout. Ces jeunes là sont un exemple palpable que ce n’est pas vrai», a-t-il indiqué.
Stanislas Damiba, Président de l’association des anciens élèves de Cuba s’est aussi réjoui de la projection de ce film qui retrace leurs parcours et difficultés à Cuba et après leur retour au pays. « Que le centre Thomas puisse une fois de plus, projetter ce film qui revient sur la vie des anciens étudiants formés à Cuba, leurs parcours, et leur symbiose avec l’ambassade de Cuba, le peuple cubain, ça ne peut que nous réjouir », a-t-il déclaré. A l’en croire, les 600 élèves revenus de Cuba ont été confrontés à d’énormes difficultés liées notamment à des problèmes d’insertion professionnelle en raison de la non-équivalence des diplômes cubains et burkinabè.
« A ce jour, nous avons dans nos rangs, près de 93 décès malheureusement et 333 qui sont à la fonction publique mais qui, en raison de l’équivalence des diplômes, sont sous-employés. Nous avons près de 267 qui ne sont pas employés et qui sont laissés pour compte malgré ce qu’ils ont appris à faire à Cuba », a-t-il déploré, invitant les autorités de la transition actuelle à se pencher sur leur situation qui dure depuis maintenant près de 35 années. « Nous sommes des enfants envoyés par un Gouvernement à Cuba à l’âge de 14 et 15 ans, et nous appelons le gouvernement de la transition qui a une vision révolutionnaire à résoudre notre problème », a-t-il plaidé.
De ses dires, trois recommandations ont été faites en son temps, au Haut Conseil pour le Réconciliation et l’Unité nationale (HCRUN), dans le sens du rétablissement de ces anciens élèves dans leurs droits. Il s’agit notamment de la reconnaissance de leurs diplômes par l’Etat burkinabè, le reclassement de leurs camarades sous-employés à la Fonction publique et la réparation du préjudice subi par ces 600 orphelins.
Oumarou KONATE
Minute.bf