Le 24 janvier 2022, le président Roch Marc Christian Kaboré, qui venait d’être réélu pour un second mandat, a été renversé par des militaires du Mouvement patriotique pour la Sauvegarde et la Restauration (MPSR), avec à leur tête le Lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba. La démocratie frêle du Burkina Faso, venait ainsi de prendre un sérieux coup. Cela a aussi sonné le retour des militaires au pouvoir, ceux-là qui ont dirigé ce pays pendant presque un demi-siècle.
Le coup d’État du 24 janvier était un pis-aller pour le peuple burkinabè qui était meurtri, depuis 2016, par des attaques à répétition qui ont causé des morts, des blessés et plus d’un million de personnes déplacées internes. Le président élu d’alors, n’arrivait plus à juguler le problème. Les attaques se succédaient et les groupes armés terroristes envahissaient de grandes portions du territoire burkinabè, contraignant des milliers de personnes à trouver asile loin de leurs propres terres. Roch Marc Christian Kaboré, qui ne voulait pas d’un militaire dans son gouvernement, a fini par céder, face à la pression croissante des groupes armés. Le département de la sécurité était confié au gendarme à la retraite, Ousseni Compaoré.
Le 30 juin 2021, face à la pression de la rue, conséquence de la répétition des attaques terroristes meurtrières, le président Roch Marc Christian Kaboré limoge les ministres de la Défense Chérif Sy et de la Sécurité Ousséni Compaoré. Il occupe lui-même la fonction de ministre de la Défense. Il nomme un ministre délégué à la défense, le général de brigade Aimé Barthélémy Simporé. « Le remaniement ministériel intervenu ce 30 juin 2021 s’inscrit dans ma volonté de donner un nouveau souffle à notre engagement face aux défis majeurs de notre Nation », avait déclaré Roch Marc Christian Kaboré sur ses comptes Twitter et Facebook. « Dans la lutte contre le terrorisme, nous devons adapter notre stratégie aux nouvelles réalités du terrain », avait affirmé le chef de l’État de l’époque.
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L’attaque terroriste d’Inata qui a causé la mort à 53 gendarmes le 14 novembre 2021, a une fois de plus secoué le pouvoir du Président Kaboré. Des informations révélées par le journal l’Événement faisait état de ce que les gendarmes manquaient de vivres depuis des semaines et ne se nourrissaient que par l’abattage d’animaux. Une information qui a suscité l’ire des populations. Les manifestations se sont accentuées demandant la démission du chef de l’État. Roch Marc Christian Kaboré avait donc demandé des enquêtes sur cette attaque en vue de situer les responsabilités. Un premier rapport lui avait été livré. Lequel rapport a été rejeté par le président du Faso, parce que les responsabilités n’étaient pas clairement situées. Un deuxième rapport a été produit. Le président Kaboré a donc, de ce rapport, sanctionné certains militaires. Malgré tout, l’insécurité a demeuré.
Face à la montée de la violence verbale sur les réseaux et les multiples appels à manifestation contre le pouvoir, le gouvernement d’alors avait décidé de restreindre l’accès à certains réseaux sociaux, dont Facebook. Cela a encore créé plus de mécontents. Les manifestations se sont multipliées. Le pouvoir du Président Kaboré balbutiait dans tous les sens. Accusé de fomenter un coup d’état, le Lieutenant-colonel Emmanuel Zoungrana, a été arrêté et incarcéré à la Maison d’arrêt et de correction des armées (MACA), le 18 janvier 2022.
La baraque du pouvoir ne tenait plus face à la pression de la rue, et surtout des militaires remontés contre la gestion chaotique du mouvement du peuple et du progrès (MPP) et ses alliés. Des politiques appellent ouvertement les militaires à prendre le pouvoir. En plus de la situation sécuritaire, celle humanitaire s’était considérablement dégradée. Des déplacés internes vivent dans le démuni et la misère.
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Au petit matin du 23 janvier 2022, des bruits de bottes se font entendre à Ouagadougou. Les armes parlent. Ce qui, au départ, semble être une revendication corporatiste de l’armée, est en réalité une tentative de putsch. Des militaires traquent le président Kaboré qui finit par abdiquer. Le régime de Roch Kaboré venait de tomber. Le Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR) prend le pouvoir, avec à sa tête le Lieutenant-Colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba. La dégradation de la situation sécuritaire était leur prétexte. Malgré l’arrivée au pouvoir des militaires, l’insécurité demeure.
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La situation s’est même dégradée, selon des experts en sécurité. Huit mois après sa gestion controversée, le Lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba est renversé à son tour par le capitaine Ibrahim Traoré, lui-même, membre du MPSR, qui accuse son prédécesseur de dévoyer la ligne qui avait été tracée par le MPSR pour la lutte contre le terrorisme.
Depuis sa prise de pouvoir le 30 septembre 2022, le capitaine Ibrahim Traoré travaille à renverser la tendance. Il a lui-même reconnu que la situation s’est dégradée. En un mois, le Burkina Faso a enregistré plus de 72 000 nouvelles personnes déplacées internes, selon les chiffres du SP/CONASUR. Mais, contrairement à ses prédécesseurs, bien que la situation sécuritaire reste catastrophique, des actions sur le terrain sont menées en vue d’inverser tendance.
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Ces dernières semaines, plusieurs dizaines de terroristes ont été neutralisés, des bases terroristes détruites, de l’armement a été récupéré des mains de l’ennemi.
Un an après le départ de Roch Kaboré, le Burkina d’aujourd’hui peine à se démarquer à celui d’hier.
La rédaction
Minute.bf