vendredi 13 décembre 2024
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Agression Madi de Gounghin : « C’était un assassinat manqué… »

L’« activiste » Madi de Gounghin a été agressé le 1er octobre dernier. Dans cet entretien accordé à www.minute.bf, la victime, narre, sans réserve, les circonstances dans lesquelles il a été tenaillé par « deux loubards » qui l’ont « tabassé » et qui ont même manqué de l’ « assassiner ». Pour l’heure, l’affaire pend devant les juridictions et Madi de Eddie dit faire confiance à la justice pour que « toute la vérité soit dite » et que les auteurs de cette violence soient châtiés à la hauteur de leur forfait. Lisez plutôt !

Comment se porte Madi de Gounghin aujourd’hui ?

Mahamadi Ouédraogo alias Madi de Gounghin ou Madi de Eddie, après avoir vécu une telle agression le 1er Octobre 2019, je peux vous certifier que je me porte très bien.

Dites-nous, qu’est-ce qu’il s’est réellement passé ce jour fatidique ?

Le 1er octobre dernier, l’activiste Madi de Gounghin a été agressé par deux « loubards »

C’est une chose qui m’a beaucoup surpris parce que je ne pensais pas être un jour victime de telles pratiques, aussi lâches et barbares. Souvent, j’entendais parler de ces actes, mais je ne pouvais pas imaginer que j’allais subir cela un jour. Pour être franc, je ne sais toujours pas les raisons qui ont motivé mon agression.

Mais voici ce qu’il s’est passé. Le soir du 1er octobre 2019, j’étais chez le garagiste parce que mon véhicule avait de petits soucis. Aux environs de 18h11 minutes, je reçois un appel d’une personne que je considérais depuis longtemps comme un ami. Aujourd’hui, je ne le considère plus comme tel parce que c’est le commanditaire de mon agression. Je le considère comme un ennemi. Je ne vais pas le nommer. Je vais laisser la justice faire son travail.

Il m’a appelé, et m’a dit qu’il a une commission pour moi. C’est quelqu’un qui m’avait déjà épaulé dans l’organisation de certaines de mes activités. Nous nous sommes connus dans le cadre politique mais  c’est un entrepreneur des Bâtiments et travaux publics (BTP). Je vais souvent dans son entreprise. Je ne savais pas que celui que je considérais comme mon frère pouvait être mon bourreau. Je pense que sous le régime de Blaise Compaoré, ce sont des pratiques que des gens mettaient en place pour exécuter certaines personnes. Des gens disparaissaient et on mettait ces disparitions sur le dos de l’ex président alors qu’il se pourrait que ce soient des actes organisés par des gens pour éliminer ceux qu’ils n’aimaient pas. Je conseille au passage tout le monde de faire attention à nos différentes relations car les lieux que nous fréquentons couramment peuvent être notre tombe.

Le monsieur m’a manqué deux fois sur WhatsApp. Je ne sais pas si c’était pour brouiller les pistes qu’il m’appelait sur ce réseau social. Il m’a donc rappelé avec un numéro de la France et m’a dit de passer à son service qu’il y a un monsieur qui va me remettre la commission en son nom. Dix à quinze minutes après, un monsieur m’appelle avec un numéro bien identifié pour me dire qu’il a une commission pour moi. J’ai cherché à savoir quelle est la nature de la commission. Il m’a dit que c’est de l’argent. J’ai donc suggéré, au regard de la distance qui nous séparait, qu’il me fasse un dépôt mobile d’argent. Le monsieur m’a fait savoir qu’il me faut faire une décharge pour justification après. Comme la nuit était déjà tombée, j’ai voulu remettre le rendez-vous au lendemain mais mon interlocuteur a dit que c’était urgent et qu’il fallait que je sois là aujourd’hui même. Pour ce faire, pour arriver à temps, j’ai abandonné mon véhicule et je suis allé avec une moto pour éviter les embouteillages. Effectivement, au bout de trente minutes, j’étais déjà à l’entreprise. Mais je n’ai trouvé personne, la porte était fermée. Il était un peu plus de 19 heures. J’ai donc appelé mon interlocuteur pour lui dire que je suis sur les lieux. Il m’a dit de l’attendre qu’il sera là dans quelques temps. Je suis donc allé prendre un soda dans une buvette à proximité de l’entreprise en attendant son arrivée. A la buvette je causais avec la femme des lieux. Quand le monsieur est arrivé, je l’ai fait venir à ma place. On causait ensemble. La bonne dame pensait même qu’on se connaissait, pourtant, c’était la première fois qu’on se voyait. C’était un homme bien élancé avec une forte corpulence. Il a pris une bière. Quelques minutes après, je lui ai dit de me remettre la commission pour que je puisse repartir. Il m’a fait savoir que la décharge devait se faire dans l’entreprise. J’ai donc laissé mon engin sous la garde de la dame des lieux et nous sommes partis. Le monsieur était devant moi quand nous rentrions au sein de l’entreprise. Dès que nous sommes rentrés, il y avait deux loubards qui avaient porté des T-shirts noirs qui se sont levés immédiatement. Le monsieur était en train de parler avec eux en mooré et après, il s’est mis derrière moi. Les deux loubards se sont approchés de moi et je pensais que c’était pour me saluer. Immédiatement, dès qu’ils sont arrivés à mon niveau les coups ont commencé à pleuvoir directement dans mes côtes. C’est en ce moment que j’ai réalisé que je suis tombé dans un piège tracé par celui que je considérais depuis lors comme étant un ami. Les coups venaient de partout et même celui qui m’a accompagné s’est mis dans la danse. Dans l’instinct de survie, je me suis défendu pour sauver ma vie. Mes agresseurs ont donc utilisé des bois et des barres de fer pour me tabasser. C’est en protégeant ma tête avec mes bras que mes mains ont été scarifiées par les bois et le fer.

Leur objectif était clair. C’était de m’assommer avec le fer et faire de moi ce qu’ils voulaient après. Mes agresseurs ne voulaient me voir ressortir sinon ils ne me battront pas dans une entreprise que je connaissais. J’ai reçu plus d’une trentaine de coups sur la tête. Mais grâce à Dieu j’ai pu me libérer de ce guet-apens pour me retrouver hors de l’entreprise. Je saignais beaucoup de la tête. Ils m’ont rejoint dehors devant une foule de badauds, et ont dit aux gens que je suis un voleur. Ils voulaient que les gens me ruent de coups pour m’éliminer. Mais personne n’est tombé dans leur coup.

J’ai demandé à ce qu’on m’appelle une ambulance pour me conduire à l’hôpital. Mais l’ambulance était injoignable et j’ai pu négocier avec un taximan qui m’a raccompagné chez moi en famille avant d’être finalement reconduit au CHU Yalgado Ouédraogo. Les agresseurs m’ont soustrait mes deux téléphones et la clé de mon engin. Voici un peu résumé, le calvaire que j’ai vécu dans les bras de ces loubards, ce que j’appelle assassinat manqué.

Pensez-vous que votre agression a un lien avec vos publications sur les réseaux sociaux, surtout que vous êtes aussi un « activiste » ?

« J’ai pu négocier avec un taximan qui m’a raccompagné chez moi en famille avant d’être finalement reconduit au CHU Yalgado Ouédraogo »

Je ne peux pas tirer de conclusion hâtive mais, tout est possible. Lorsque les auteurs seront appréhendés, puisqu’ils ont été identifiés, ils donneront les raisons qui ont motivé mon agression. J’ai tout de même ma lecture personnelle même si on me dit de ne pas tirer de conclusion hâtive, je mets ce qui m’est arrivé dans le cadre politique. Peut-être que c’est mon rapprochement avec le président Eddie Komboïgo, le fait que je le défends sur les réseaux sociaux à travers certaines situations de complexités et autres que certaines personnes ont décidé de m’écarter, de m’éliminer, je n’en sais rien. Je n’affirme pas mais je pense que c’est peut-être lié à cela. De toutes les façons,  je fais confiance aux juridictions de ce pays et j’attends que toute la vérité soit dite sur cette affaire.

Le commanditaire, est-il un membre de votre parti politique ?

Le commanditaire, c’est un entrepreneur et comme vous le savez, les entrepreneurs n’ont pas de parti politique en général. Ils se disent apolitique mais quand le vent tourne, ils suivent le sens du  vent.  Ce qui veut dire qu’aujourd’hui, s’il est du Mouvement du Peuple pour le Progrès (MPP), il a des connexions au Congrès pour la Démocratie et le Progrès (CDP), il a des connexions dans tous les autres partis. Parce que si le MPP n’est plus au pouvoir et c’est l’Union du Progrès pour le Changement (UPC), le CDP ou n’importe quel autre parti qui est au pouvoir, vous allez voir que ces mêmes entrepreneurs vont aller dans ces partis. Donc dire qu’il a un parti politique, qu’un entrepreneur a un parti politique, moi je dirai tout simplement qu’il est dans tous les partis politiques.

Du fait de votre rapprochement avec le président Eddie Komboïgo, pensez-vous que le commanditaire de votre agression soit à l’interne ?

Je ne tirerai pas de conclusion hâtive parce que si les enquêtes révèlent autre chose, c’est comme si je faisais de la diffamation, de la désinformation, comme si je livrais quelqu’un au lynchage. J’attends d’abord les enquêtes. Tout ce que je réclame, c’est la vérité, qu’on me rende justice. Parce que je me suis dit qu’à un moment donné de notre vie, en tant que des humains, on commet tous des erreurs. Un être humain aujourd’hui, quand il est lésé dans ses droits, il y a des institutions pour régler ces questions. On n’a pas besoin de recourir à la violence pour se faire entendre. Rien ne prouve que ce soient mes publications sur Facebook qui ont été la cause de cette agression. Peut-être, c’est à travers ce que je dis dans la vie courante, mes causeries dans les thé-débats avec mes amis et autres. Mais, ce n’est pas parce que je parle de quelqu’un, que ce soit en bien ou en mal, que la personne va utiliser la violence pour se faire entendre. Quand vous utilisez la violence pour vous faire entendre, vous pensez que vous êtes fort mais en réalité vous êtes faible, vous n’êtes rien, vous êtes lâche. La violence, c’est l’arme des faibles, c’est l’arme des lâches. Hier ou avant-hier seulement, le procureur a ordonné l’arrestation d’un certain Nikiema pour incitation à la haine dans une de ses publications. Il demandait à ce qu’on construise des camps de concentration pour les peulhs, mais des peulhs pouvaient aller le violenter. Mais c’est plutôt le procureur qui a demandé qu’on l’arrête et il ira réfléchir ne serait-ce que deux jours sur ce qu’il a fait.

Nous sommes dans un Etat de droit et je pense que c’est ainsi que l’on doit agir. Il faut qu’on arrête ces pratiques qui consistent à utiliser la violence. Je pouvais répliquer! Je ne suis pas lâche, je suis démocrate et républicain en plus. Je vais utiliser les institutions de l’Etat pour réclamer justice et je vais veiller à ce que justice soit rendue même au péril de ma vie. Ce qu’ils m’ont fait, je pouvais leur rendre la pareille. Je peux payer 100 jeunes, tout de suite là, on va aller saccager chez quelqu’un. Mais pensez-vous que, parce que quelqu’un m’a donné un coup, je dois lui rendre deux coups? Il faut qu’on arrête cette manière de penser car nul n’a le monopole de la violence.

Avez-vous déjà porté plainte ?

J’ai porté plainte et je suis le dossier de près. J’ai confiance aux juridictions du pays et je sais que j’aurai satisfaction dans cette affaire.

Parlons un peu politique. Que pensez-vous de la lettre de Blaise Compaoré qui demande au président actuel de rapporter les sanctions contre certains militants du CDP, et de réintégrer les sanctionnés ?

« J’ai porté plainte et je suis le dossier de près »

Concernant la décision du président d’honneur du CDP, Blaise Compaoré, qui demande de revenir sur les sanctions et aux sanctionnés aussi de retirer les plaintes contre le parti et d’arrêter les querelles intestines, je pense qu’il est le père fondateur et le président d’honneur du parti, et quand vous prenez les règlements et statuts du parti, on lui a donné un certain pouvoir. C’est ce pouvoir-là qu’il exerce. Il n’impose rien. Il y a un article qui le précise, de sorte que même une décision prise à un congrès, il faut son aval. Concernant la désignation du candidat, il va toujours donner son point de vue. Je pense que la démarche du président s’inscrit dans la logique de voir grandir le parti.

Aucun politicien n’exclut des militants avec joie. Même ceux qui disent sur les réseaux sociaux que « mieux vaut être seul que mal accompagné », c’est un proverbe mais la réalité est toute autre. Je pense que Blaise Compaoré a une vision de réunir les gens, de resserrer les liens. D’ailleurs, le président Eddie Komboïgo a toujours prôné l’union. Il n’est pas sorti pour commencer à sanctionner ses camarades. Le président Eddie, malgré les attaques, les coups bas et tout ce qu’on faisait derrière son dos, il acceptait et demandait aux militants récalcitrants qui avaient pris une autre voie, de revenir dans les rangs.

Tout se discute à l’interne, ça ne se déporte pas sur la place publique. Je salue le fait que président Eddie et la direction soit en phase avec les décisions du fondateur du parti, comme ils l’ont dit, pour aller en bloc afin de remporter des victoires. Mais, ce que je crains, est ce que les sanctionnés, conformément à ce que le fondateur a dit, vont revenir et se conformer ? Actuellement, certains camarades ne mènent plus seulement des combats politiques internes, c’est une haine qu’ils ont à l’encontre du président Eddie. Mais la politique, ce n’est pas la haine.

Est-ce que Madi de Eddie est membre du bureau politique national du CDP ?

Effectivement, je me rappelle qu’à la conférence de presse organisée par Mahamadi Lamine Kouanda, ce dernier confiait que je faisais partie du Bureau politique national du parti. Je peux vous certifier, avec preuve à l’appui, que Mahamadi Ouédraogo alias Madi de Gounghin ou Madi de Eddie ne fait pas partie du bureau politique national. Je ne fais partie d’aucune structure du CDP. J’ai demandé à ne pas faire partie des structures. C’est une décision et motivation personnelle. Quand j’ai démissionné du MPP, j’ai demandé à ne pas faire partie des structures de mon nouveau parti. J’ai simplement dit que je vais créer un mouvement pour accompagner le président Eddie Komboïgo. Peut-être j’en ferai partie dans les années à venir, après un congrès, si le président Eddie Komboïgo veut toujours être président du CDP.

Un dernier mot pour conclure ?

Mon dernier mot va à l’endroit des juridictions du pays. Je fais entièrement confiance à tous les services qui sont chargés d’élucider l’affaire de mon agression. Je fais confiance à la justice, à la gendarmerie, à la police, à tous les services qui œuvrent au quotidien pour que le Burkina Faso soit un pays juste. J’ai foi que la vérité sera dite dans cette affaire.

Propos recueillis par Armand Kinda

Minute.bf

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