Le Centre d’Analyse des Politiques économiques et Sociales (CAPES) a initié dans la matinée de ce lundi 4 septembre 2023, une conférence internationale sur le thème : « Souveraineté politique et monétaire dans l’espace CEDEAO : Faut-il poursuivre la transition du CFA à l’ECO? ». Le top départ de cette conférence qui réunit d’éminents enseignants-chercheurs et économistes de plusieurs pays de la sous-région, a été donné par le Premier ministre Apollinaire Kyélem de Tambela.
Participer à la réflexion sur la souveraineté monétaire et l’indépendance politique des pays de la CEDEAO. C’est l’objectif visé par le CAPES à travers l’organisation de cette conférence internationale. De façon spécifique, selon les organisateurs, il est question principalement de produire des idées sur la pertinence de l’ECO, comme garant de la souveraineté politique et monétaire des États membres, mener une réflexion sur l’ancrage de l’ECO afin de prendre en compte les nouveaux partenariats de développement et de réfléchir à une alternative économiquement faisable et viable pour les pays en crise dans la conquête de leur souveraineté politique et monétaire.
Le choix de cette thématique se justifie, selon Victor Sanou, Directeur exécutif du CAPES, par le contexte actuel qui prévaut dans les pays du Sahel. « Les jeunes du Sahel sont debout et posent des questions essentielles et existentialistes. Parmi ces questions figurent en bonne place la problématique de la souveraineté politique et monétaire. Longtemps sujets tabous, puis sujets de débats des milieux activistes, ces questions se sont déportées depuis quelques décennies dans les cercles académiques des pays africains avec grand succès. Mener ce débat n’est pas toujours un exercice sans risque tant les enjeux sont importants. La conférence internationale de ce jour s’inscrit dans l’élan de nourrir avec courage, peu importe le prix à payer, le débat dans un cadre scientifique avec méthodes et minuties », a-t-il justifié.
Il s’agira également, à l’en croire, de poser le débat sur la pertinence de continuer vers l’ECO dans le cadre de la CEDEAO au vu des sanctions récemment imposées par cette institution sous-régionale aux pays du sahel. « Au Mali, au Burkina Faso, au Niger et en Guinée, après l’accession aux affaires de régimes militaires adoubés par leurs peuples, l’instance communautaire qu’est la CEDEAO, est montée au créneau pour leur infliger des sanctions. Ces sanctions passent pour l’essentiel par le canal économique et monétaire. Face à la souffrance des populations et sachant que nos Etats sont engagés dans un processus devant les conduire à l’horizon 2027 à l’adoption de l’ECO comme nouvelle monnaie communautaire, il est apparu de bon ton pour le CAPES de s’interroger si la dynamique enclenchée est la bonne », a-t-il signifié.
Pour ce faire, a-t-il dit, quatre (04) panelistes composés d’universitaires de rang magistral partageront leur savoir sur la question. Il s’agit du Professeur Léon Sampana, du Pr Idrissa Ouédraogo et des praticiens du développement dotés d’une grande maitrise des préoccupations monétaires de la
zone franc en l’occurrence les Professeurs Kako Nubukpo et Mamadou Koulibaly. La modération quant à elle est assurée par l’économiste, spécialiste de l’économie du développement, Pr Pam Zahonogo.
Aux dires du Directeur du CAPES, à l’issue des débats, un rapport sera élaboré et contiendra les présentations des panelistes et la synthèse des échanges. Des recommandations sous forme d’orientations ou d’approfondissement des réflexions seront également proposées.
Prononçant le discours d’ouverture de la conférence, le Premier ministre Apollinaire Kyélem de Tambela a salué la tenue de ce panel qui permettra, dit-il, de mener la réflexion sur la souveraineté monétaire des États africains. Pour lui, la monnaie a toujours existé dans les sociétés même avant la colonisation, avec le troc. « Celui qui veut échanger des fruits ou des produits maraîchers non transformés contre des meubles, des tissus ou des armes est dans une situation d’infériorité. Il suffit à son partenaire d’attendre que les fruits ou les produits maraîchers commencent à se détériorer pour imposer sa propre mesure et gagner aux changes. Il en est de même de nos monnaies actuelles. Celui dont la monnaie est basée sur des produits dont il n’a pas le contrôle du marché ne peut non plus avoir le contrôle de sa monnaie. Dans nos pays, nos richesses sont constituées principalement de matières premières minérales et aussi des matières premières agricoles, non seulement nous ne sommes pas les seuls à les produire donc nous ne maîtrisons pas les prix sur le marché international. Les prix sont fixés à Paris, à Londres ou à New York. Ils peuvent baisser ou grimper au gré du marché. Dans ces conditions, il est difficile d’avoir une monnaie stable basée sur ces produits à moins de chercher une autre garantie », a-t-il relevé, insistant sur le fait qu’il est donc indispensable de réfléchir à des alternatives crédibles et profitables à l’Afrique et aux peuples africains.
Tout en souhaitant des débats fructueux aux participants, le chef du gouvernement burkinabè a formulé le vœu que de ces différentes communications émergent des idées à même de dégager des voies pour une réelle souveraineté des pays africains.
Oumarou KONATE
Minute.bf