samedi 15 février 2025
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Sourou : Il faut sauver le « premier grenier » du Burkina Faso

Lassina Sanago est le maire de la commune rurale de Lanfièra dans la province du Sourou. Dans cet entretien que minute.bf a eu avec lui, à l’occasion de la célébration du 95e anniversaire de l’école Alwata Diawara à Tougan le 28 novembre dernier, il est revenu sur la situation sécuritaire de sa commune qui, faut-il le rappeler, connait depuis plusieurs mois une crise sécuritaire comme dans plusieurs communes du Burkina Faso. (Interview)

Minute.bf : Votre commune vit depuis un certain temps des situations difficiles, pouvez-vous nous en parler ?

Lassina Sonogo : Comme certaines communes du Burkina, la commune de Lanfièra qui est frontalière avec le Mali, fait face à l’insécurité avec des attaques terroristes. Nous sommes sur la bande rouge comme on le dit souvent. Effectivement, nous traversons une crise depuis une année.  Notre gendarmerie a été attaquée deux fois, ce qui fait que dans la zone, c’est vraiment l’insécurité et nous avons des difficultés ces derniers temps. Côté éducation, les classes sont fermées, ce qui impacte beaucoup notre développement économique. Tout est au point mort.

Nous demandons aux autorités de voir ce qui peut être fait pour nous, surtout que nous sommes dans une zone où l’Etat a fait un grand aménagement. Nous souhaitons une sécurisation de la zone. On dit que la Boucle du Mouhoun est le grenier du Burkina, mieux, la province du Sourou,  si je ne m’abuse, est le premier grenier parce que l’Etat y a aménagé plus de 10 000 hectares, et il y a des cultures aussi bien en saison hivernale qu’en saison sèche. Donc, si cette zone n’est pas sécurisée, c’est une famine en vue. Nous voulons que l’Etat renforce la sécurité dans la zone pour que les populations puissent mener leurs activités.

Minute.bf : Votre commune connait-elle les déplacements de population comme dans certaines zones ?

Lassina Sanogo : Il y a des déplacements de population dans notre commune, mais fort heureusement, il y a l’hospitalité africaine. Ces populations sont accueillies dans des familles qui les adoptent. Pour le moment, nous n’avons pas de sites aménagés à cet effet.

Minute.bf : Depuis le début des évènements, quelles sont les mesures prises dans la zone pour faire régner un minimum de quiétude pour la population ?

Lassina Sanogo : C’est une question de sécurité, c’est un secret. Peut-être qu’il y a certaines choses que nous ne voyons pas. En profane, nous pensons tout de même que la sécurité est un peu légère parce que la brigade de Lanfièra a été brûlée ; les éléments n’ont pas de bâtiments. Nous aurions souhaité que l’on renforce cette sécurité, qu’il y ait de temps en temps des patrouilles militaires. Mais peut-être que nous ne voyons pas et qu’ils ont leurs méthodes. Récemment, le gouverneur a pris une mesure de couvre-feu dans la zone du Sourou et du Nayala. Cela nous rassure un peu la nuit, mais nous demandons toujours que l’Etat mette l’accent sur la sécurisation en envoyant des forces de défense et de sécurité dans la zone.

Il y a des points où ils ont installé des gens mais Lanfièra est à 20, voire 30 kilomètres de la frontière malienne. Et, au regard de ce que nous voyons la bas, l’on ne sent pas beaucoup la sécurité. Je pense qu’il n’y a pas assez d’éléments, en plus, ces éléments demandent à être mieux équipés et à avoir du renfort.

« Nous souhaitons vraiment que l’Etat mette les moyens pour que les attaques cessent »

Minute.bf : Avec l’instauration du couvre-feu, comment est la situation actuellement ?

Lassina Sanogo : La mesure est respectée ; dès 18h, toutes les populations sont rentrées. Nous les remercions d’ailleurs pour cette collaboration. C’est une mesure contraignante, mais  elles ont compris que c’est dans leur intérêt. Nous leur avons également demandé de collaborer avec les forces de sécurité en leur fournissant des renseignements et en signalant les choses suspectes.

Minute.bf : Après l’attaque de Toéni, il semblerait que le dispositif qui avait été mis en place aurait levé le camp. Sont-ils de retour de nos jours ou bien c’est le statut quo ?

Lassina Sanogo : Il est vrai que je ne suis pas dans la zone de Toeni mais comme je le disais tantôt, nous avons des difficultés parce que dans la zone de Lanfièra jusque-là, nous ne voyons pas de renfort, c’est-à-dire, un redéploiement de nouveaux personnels. Ce sont les mêmes gendarmes et policiers qui étaient là depuis. Je sens que c’est un peu pareil partout. Quand nous entendons parfois dire qu’il y a quelque chose à l’Est ou au Nord, nous voulons aussi entendre que dans la Boucle du Mouhoun, il y a quelque chose. Malheureusement, on ne le voit pas venir. C’est un secret et peut-être qu’ils ont leur stratégie, leur manière de voir. Je suis un profane qui ne peut pas décider à leur place mais nous voulons les voir pour nous rassurer.

Minute.bf : Des infrastructures administratives, des écoles, des services de santé, des représentations de l’Etat… sont fermés dans certaines communes à cause de l’insécurité. Quel est l’état actuel des choses à Lanfièra?

Lassina Sanogo : Considérez que le primaire est fermé, le secondaire est fermé et la santé essaie de faire le minimum. Les attaques visent essentiellement les symboles de l’Etat notamment la sécurité, les autorités et les fonctionnaires. Les autres essaient de faire ce qu’ils peuvent, mais ils ne sont pas rassurés.

Minute.bf : Quel est votre cri de cœur actuellement ?

Lassina Sanogo : Comme je l’ai dit et je le répète, nous demandons le renforcement de la sécurité. Nous souhaitons vraiment que l’Etat mette les moyens pour que les attaques cessent. Nous sommes une population pauvre qui ne vit que de l’agriculture. Si nous arrêtons nos activités, c’est la famine qui nous frappera et la population risque de se déporter.

Je faisais savoir à la jeunesse de Lanfiéra qu’après les récoltes, les gens partaient en Côte d’Ivoire, mais depuis 10 ans, personne ne bouge. Actuellement dans les communes, les villages où il y a eu les aménagements, tous les jeunes ont des motos,  ils ont des voitures et l’on sent vraiment qu’il y a de l’activité. Mais si l’on met un frein à cela, imaginez ce que cela va créer. Donc, notre souhait est que l’Etat sécurise mieux cette zone surtout la vallée du Sourou où des milliards ont été investis.

Propos recueillis par Armand Kinda

Minute.bf

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