Dans le village de Rimkilga, localité située dans la commune de Pissila, province du Sanmatenga, dans la région du Centre-nord, des paysans ont été arnaqués par des individus qui se faisaient passer pour un agent de OXFAM. Que s’est-il passé réellement ? www.minute.bf a cherché à comprendre.
En début d’année 2021, le conseiller villageois de développement (CVD) du village de Rimkilga a reçu un appel venant d’un numéro inconnu. L’interlocuteur s’est présenté comme un agent de OXFAM et a ajouté qu’il souhaiterait voir le chef du village pour échanger sur l’objet de sa mission.
A écouter le conseiller Yamneya Ouédraogo, le prétendu agent a signifié qu’il disposait déjà des numéros des conseillers depuis la mairie de Pissila. « J’étais chez moi et j’ai reçu l’appel venant d’un de mes pairs. Qu’il venait de recevoir l’appel d’un agent de OXFAM et voudrait que je parte à sa rencontre. Je me suis vite rendu sur le lieu et j’ai accueilli l’homme comme tout bon étranger pour lui demander l’objet de sa visite. C’est là qu’il m’a fait savoir qu’il a été mandaté par l’ONG OXFAM pour un recensement afin de porter un secours aux agriculteurs. Avant de le conduire chez le chef, la question qui m’est venue à l’idée c’est de savoir si la mairie de Pissila est au courant de sa visite. Il m’a rassuré que la mairie est au courant et que nos contacts lui ont été remis là-bas. Rassuré, j’ai ensuite conduit le missionnaire chez le chef du village qui, malheureusement était en déplacement mais un vieux le représentait pour de pareils imprévus », a confié le conseiller Yamneya Ouédraogo à Minute.bf.
Comment se fait l’enrôlement des paysans? Le missionnaire affirme que toute personne âgée d’au moins 18 ans et ayant une CNIB et un numéro téléphone est éligible à 1100 FCFA comme frais de dossiers. Hommes et femmes sur les rangs, le missionnaire s’est fait aider par un jeune du village au regard du nombre de volontaires. Une centaine de personnes ont été enregistrées sans compter les personnes enrôlées dans les villages voisins.
Après avoir commis son forfait, l’arnaqueur s’est replié tout en rassurant les pauvres paysans qu’ils recevront leurs intrants agricoles à l’orée de la saison pluvieuse, c’est-à-dire courant mai 2021. Des mois passèrent et l’homme ne donnait toujours pas de suite au recensement. La communication qui se passait par téléphone s’est coupée, ce qui a quelque peu effrité la confiance qui existait entre les paysans et les conseillers qui leur ont présenté le supposé agent de OXFAM. Les pauvres agriculteurs ont attendu la réalisation des promesses jusqu’à la récolte sans satisfaction.
Les villages de Lebda, Roungou et Goéma victimes
C’est en début décembre 2021, que le secrétaire du CVD, Jacob Ouédraogo, a reçu un appel venant de la brigade de la gendarmerie de Boussouma qui a enfin situé les faits. Selon ses explications, la gendarmerie aurait mis la main sur la bande d’arnarqueurs. «J’ai reçu un appel de la part de la gendarmerie de Boussouma. Le gendarme qui était au téléphone m’a fait savoir qu’il m’appelait au sujet de l’individu qui se faisait passer pour un missionnaire de OXFAM. Il affirme que des renseignements ont permis d’appréhender la bande et que la stratégie mise en place est un mensonge fabriqué pour tromper la vigilance des paysans. Il a demandé à ce que nous fassions parvenir la liste de tous ceux qui s’étaient inscrits à la gendarmerie pour des vérifications », a expliqué Jacob Ouédraogo, stylo à la main en train de dresser la liste des concernés réunis autour de lui.
Selon toujours M. Ouédraogo, d’autres villages voisins de Rimkilga sont concernés par cette affaire. Lebda, Roungou et Goéma dans la même commune se sont enrôlés par la même structure. Le chef du village, interrogé par www.minute.bf, a confirmé les faits.
«Dès mon retour, j’ai été informé qu’un agent de OXFAM était de passage dans mon village pour recenser les paysans afin de les aider en intrants agricoles notamment des semences et de l’engrais. J’ai dit que cela est salutaire si les sources sont crédibles. Mais, c’est à l’approche de la saison pluvieuse, lorsque nous étions sans nouvelle des intrants agricoles qui avaient été promis aux populations, que nous nous sommes rendu compte que l’affaire n’est pas claire », a déploré le chef du village.
Par cet exemple, le chef a profité donner des instructions à ses conseillers afin de leur éviter une autre arnaque. « Il faut faire très attention à toute structure qui passera pour une quelconque action similaire sans présentation d’une note venant des autorités communales. Si d’autres venaient à se présenter dans le village, il faudrait transmettre vite leurs coordonnées aux autorités communales pour des besoins d’enquêtes », a conseillé Naaba Koanga, chef de canton de Rimkilga.
Dans cette situation d’insécurité grandissante occasionnant la misère des populations rurales, des structures non reconnues profitent de leur vulnérabilité pour les arnaquer en s’enveloppant dans une couverture des structures humanitaires. Pour l’heure, la brigade de la gendarmerie nationale de Boussouma serait en train de collecter les listes des personnes concernées et l’affaire ira en justice pour situer les responsabilités.
Samdpawendé Sawadogo (correspondant)
Minute.bf
