La fête de Noël rime le plus souvent avec forte activité commerciale. Fête de la naissance du petit Jésus, elle est connue pour être un évènement au cours duquel les enfants reçoivent des cadeaux. Ainsi, depuis quelques jours à Ouagadougou, les abords des voies ont été improvisés en lieux de vente de crèches pour enfants, de sapins, guirlandes et autres décoratifs. Mais cette année, la situation n’est pas reluisante pour ces commerçants. Ces lieux spontanés de vente d’artifices de Noël qui, d’ordinaire ne désemplissaient pas, sont vides de clients. Les Ouagavillois semblent n’avoir pas la tête à la fête et les affaires marchent au ralenti. C’est du moins le constat fait par une équipe de Minute.bf dans la ville, le mercredi 21 décembre 2022.
Sur l’avenue de l’indépendance, Yacouba Koanda a étalé ses marchandises sur le trottoir. A coups de hélés, il interpelle des passants qui ne daignent même pas jeter un coup d’œil sur son étalage. A notre arrivée, le commerçant d’occasion se précipite à notre rencontre, tout sourire. « Bonne arrivée, il y a des arbres de Noël, jeux de lumière, guirlandes, crèches. Vous voulez lequel? », s’empresse-t-il de nous questionner. Lorsque nous lui déclinons notre identité et les motifs de notre visite, son visage se crispe, lui qui croyait avoir affaire à de potentiels clients.
Après quelques tractations, il accepte finalement de s’ouvrir à nous. « Actuellement, ça ne va pas. Le marché n’est pas comme avant. Depuis matin, je suis là, personne n’est encore venue. Ça fait près de dix ans, qu’à chaque fête je vends ces artifices mais ces dernières années là, ça ne va pas. Depuis le matin, je suis sorti, mais rien n’a été acheté d’abord », nous confie-t-il. Toutefois, il dit comprendre la cause de cette morosité. « Ce n’est pas la faute à quelqu’un. C’est ceux-mêmes qui venaient acheter là qui sont dans l’insécurité actuellement, donc c’est compliqué. Ce que nous on peut faire seulement, c’est de prier pour que la paix revienne au pays », nous dit-il, résigné.
La devanture de la cathédrale Notre-Dame de la Paix a aussi été transformée en un site d’exposition de ces petits cadeaux de Noël. C’est là que Pascal Pafadnam a étalé sa marchandise. En plus des objets de piété, il vend des pagnes religieux. Selon la qualité des pagnes, les prix varient entre 2 000 et 6 000 FCFA. Mais chez lui aussi, « le marché est mou ». Il se désole de l’ambiance qui règne cette année. « Cette année là, le marché est mou. Les gens viennent un à un mais ils disent qu’ils n’ont pas d’argent. Ce n’est pas comme l’année passée. L’année passée ces temps-ci, il y avait beaucoup de gens. Mais cette année, c’est lent », ajoute le commerçant qui dit imputer cette situation à la réalité sécuritaire du pays.
Son cas, confie-t-il, est d’autant plus complexe que certains pagnes qu’il commercialise sont confectionnés par année de Noël. Il lui faut donc évacuer le stock en sa disposition, au risque de les voir frappés de désuétude.
La précarité de la situation ne touche pas uniquement que les vendeurs d’artifices de Noël. Du côté des commerçants de vêtements, tissus et chaussures, c’est aussi la même situation. Les marchandises ne se vendent pas, et ce n’est pas Sané Lassané qui dira le contraire. Vendeur de pagne au marché Roodwoko, ses affaires sont au ralenti cette année. « L’ambiance au grand marché ici n’est pas une ambiance de fête. En tout cas, on ne sent même pas que les fêtes approchent. Sinon les pagnes que vous voyez, d’habitude à l’heure actuelle, je n’ai même pas le temps pour vous parler tellement les gens sont nombreux ici. Mais bon, vous même vous voyez la situation », nous lance-t-il avant de se consoler par le fait que c’est une situation normale au regard de la situation sécuritaire.
« C’est normal, les Burkinabè n’ont pas la tête à la fête actuellement. Avec ce qui se passe dans le pays, ce qui nous regarde actuellement c’est l’affaire des djihadistes. On sait que si la situation sécuritaire s’améliore, nous aussi notre commerce va s’améliorer. Les fêtes, ça ne finit pas », est-il convaincu.
Dans la boutique de son voisin, Seydou Ouédraogo, les affaires ne sont pas non plus au beau fixe. Les clients se font rares et les affaires ne tournent pas. « Depuis avant hier que je suis ici, il n’y a pas quelqu’un même qui est venu me donner quelque chose. Ça ne marche pas », nous lance-t-il sans plus, la mine déconfite.
« Il faut vraiment que la paix revienne sinon c’est pas facile. Plus rien ne va dans le pays », nous dit-il, tout en formulant à titre de voeux, que la situation sécuritaire s’améliore dans le pays.
Oumarou KONATE et Jean-François SOME (Stagiaire)
Minute.bf