samedi 28 juin 2025
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Éducation : Le lycée Bogodogo agonise sous le poids de l’âge

L’âge pèse fort sur le lycée Bogodogo créé en 1958. Aujourd’hui, ce lycée est âgé de 63 ans. Du haut de son troisième âge, il commence à s’étouffer. Le personnel et les parents d’élèves de ce « vieux » lycée, qui a sans doute formé des cadres de ce pays, alertent sur la vétusté des infrastructures. Le samedi 7 août dernier, pour porter leur cri de cœur au plus haut niveau, les parents d’élèves de ce lycée situé en face du Centre Hospitalier Universitaire (CHU) Yalgado Ouédraogo, plus grand centre de santé du Burkina Faso, ont organisé une journée de l’excellence pour récompenser les meilleurs élèves issus des différents examens de fin d’année. Ils ont saisi l’occasion pour lancer un appel aux anciens élèves de cet établissement, à tous les parents d’élèves et surtout aux autorités compétentes à voler au secours du Bogodogo qui a fourni des compétences dans tous les domaines scientifiques à plusieurs personnalités de ce pays. Reportage !

Il est 10h20 minutes ce 1er septembre 2021. Nous sommes dans l’enceinte du lycée Bogodogo, devant le local qui abrite le service « Vie scolaire ». Nous sommes accueillis sur ce lieu par Karim Diallo, président du bureau de l’Association des parents d’élèves (APE) dudit lycée. Il nous redirige vers le bureau de l’intendant, Richard Sondo. Quelques minutes après, nous sommes reçus par M. Sondo, qui nous permet de visiter certains locaux de l’Etablissement. Il était déjà 10h40 minutes.

Nous entrons dans la première salle de classe. C’est un bâtiment totalement délabré qui se présente à nous. La peinture grise est en grande partie rabotée et se couvre peu à peu du rouge terre, une couleur imposée par les intempéries. Le plafond de cette classe menace de s’affaisser. Les coins du plafond vomissent de l’eau à chaque manifestation orageuse, envahissant toute la classe. « Pendant les examens, lorsqu’il y a la pluie, les candidats ont les pieds dans l’eau. Même pendant les cours, lorsqu’il pleut seulement, les élèves ont les pieds dans l’eau. Nous sommes obligés de faire déplacer certains dans d’autres salles », confirme Mathias Bougaïré, délégué du personnel du lycée Bogodogo.

Vidéo – Richard Sondo, intendant du lycée Bogodogo plaide pour la réhabilitation de l’établissement

Tout le bâtiment a besoin de réfection et d’entretien. Le matériel utilisé par les enseignants reste à désirer. La terrasse a pu se caméléoner au fil des années en suivant les humeurs du temps. Les traces d’eau restent visibles. Les conditions d’étude des élèves dans cet établissement sont à améliorer, consentent les parents d’élèves.

Après cette première classe, nous nous dirigeons vers une autre salle de cours. Le hall que nous traversons nous tutoie d’une mine grave par son toit perforé par la rouille qui y règne en maître depuis des années. Comme s’il avait été foudroyé, le plafond n’existait presque plus. Les ouvertures du toit rouillé, comme des yeux, ne nous quittaient plus du regard. Le lycée Bogodogo, « premier lycée scientifique » du Burkina, se meurt. C’est le sentiment que l’on a en visitant les différents locaux qu’abrite cet établissement vieux de 63 ans.

Le laboratoire bâillonné par des toiles d’araignée…

Après avoir traversé le couloir, nous voici face au laboratoire du lycée. Ce local ne présente aucune trace de vie. Du matériel vétuste, des tables-bancs engloutis dans la poussière, un plafond tremblotant au simple soufflement du vent, bref, le laboratoire a presque disparu. Il n’existe que sur papier. « Rien ne fonctionne au laboratoire. Les toiles d’araignée ont envahi le local », lâche Remi Kaboré, Délégué général (DG) du lycée Bogodogo.

Vidéo – Mathias Bougaïré, délégué du personnel du lycée Bogodogo appelle à l’amélioration des conditions de vie et de travail du personnel et des élèves

Après le laboratoire, nous avons visité une autre salle de classe et le local qui abrite le service « Vie scolaire ». Le constat reste le même. Tout l’établissement Bogodogo a besoin d’un nouveau plateau technique de soin pour se remettre sur pied et redonner le sourire à ces centaines d’élèves qui y poursuivent leur cursus scolaire.

« Si le lycée arrive encore à enregistrer jusqu’à présent des résultats, c’est vraiment dû au courage et à la très bonne volonté du personnel enseignant ; autrement, le lycée de nos jours allait crouler », appui désespérément M. Bougaïré, avant d’avouer qu’ « il ne fait pas bon vivre au Bogodogo ». Pour redonner à ce lycée son excellence d’antan, « il faut que des bonnes volontés y interviennent », dit-il. Pour ce faire, a-t-il souhaité l’amélioration des conditions de vie et de travail du personnel, mais aussi des élèves au niveau du lycée Bogodogo.  « Cette amélioration, comme vous le savez déjà, passe par la rénovation et la fourniture en matériel de qualité nécessaire pour le bon fonctionnement du lycée », a-t-il précisé.

« La vie au lycée Bogodogo est très compliquée. Des salles de classe au terrain en passant par la bibliothèque, la cantine, l’infirmerie, rien ne va », a insisté Remi Kaboré. « Il est vrai que la réhabilitation de ce lycée peut ne pas être une priorité quand on sait qu’il y a des localités où des élèves prennent des cours sous des arbres ou dans des écoles sous paillotte, mais au regard du fait que Bogodogo est un lycée de référence, qui a formé bon nombre de cadres de ce pays, nous estimons qu’il est déplorable de constater qu’après 63 ans d’existence, le lycée se retrouve dans un tel état », a déploré le DG des élèves du « Grand Bog », confiant que l’année dernière, un plafond s’est écroulé sur un élève.

Le laboratoire du lycée Bogodogo en piteux état

« Heureusement que ce n’était pas grave. Lorsque nous avons conduit l’élève à l’infirmerie, il se trouvait que notre infirmerie manquait de produits. C’est pour dire qu’au lycée Bogodogo, depuis un certain nombre d’années, dans l’administration, la vie des élèves et leurs conditions d’études sont très compliquées », explique M. Kaboré.  Il invite toute personne qui peut agir pour que la situation change, à le faire afin que les élèves de ce grand lycée se sentent « dignes d’appartenir au Bogodogo ».

Le DG des élèves a ainsi plaidé pour la réhabilitation des locaux du lycée, l’équipement de la bibliothèque et de l’infirmerie, la présence d’un infirmier permanent au lycée ainsi que pour la réhabilitation de la cantine et du terrain de sport.

Pour sa part, Karim Diallo, président du bureau de l’APE dudit lycée, affirme que le problème a été porté chez le ministre en charge de l’éducation nationale, Stanislas Ouaro. « Le ministre ne nous a pas caché la vérité. Il a sincèrement dit que tous les établissements publics vivent la même réalité », a-t-il confié. Ainsi, fort de ce constat, les parents d’élèves se sont tournés vers des entreprises de la place qui font du bâtiment.

Vidéo – Plus de détails dans cette vidéo de Karim Diallo, président du bureau APE/Bogodogo

Appel à la mobilisation des parents d’élèves

Le président du bureau APE Bogodogo a saisi l’occasion pour lancer un appel à la mobilisation de tous les parents des plus de 800 élèves, pour la cause du lycée qui meurt lentement, sous le poids de la vétusté de ses locaux. Il les appelle donc à prendre part aux différentes assemblées générales et autres rencontres des parents d’élèves, pour défendre la cause de l’établissement.

Remi Kaboré, Délégué général (DG) du lycée Bogodogo

Il a aussi invité les parents d’élèves à « fréquenter le bureau de la vie scolaire » en vue de suivre l’évolution de leur enfant sur ce lycée. « Ce n’est pas le comportement que l’enfant a à la maison qu’il a à l’école. C’est pour éviter les surprises désagréables, parce qu’on a vu des gens qui ne viennent carrément qu’en début d’année pour prendre les bulletins et ils se rendent compte que l’enfant est exclu », confie-t-il.

Aux environs de 11h 41 minutes, pendant que nous quittions les lieux, des élèves se succédaient à la Vie scolaire. Les inscriptions se poursuivent pour cette nouvelle année scolaire 2021-2022. Les orages se manifestent toujours en cette saison pluvieuse. Le ciel ne cesse de gronder. Dans quelles conditions les élèves prendront cours, quand on sait que l’hivernage n’est pas encore terminé ? La rentrée scolaire c’est pour le 1er octobre 2021…

Armand Kinda

Minute.bf

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