Sur invitation du consortium Centre pour la gouvernance démocratique (CGD), Diakonia, NDI et Pax, le Colonel Auguste Denise Barry, expert en sécurité, a donné une communication le mercredi 14 décembre 2022, sur le thème : « État des lieux des accords de coopération internationale, déterminants et enjeux ».
Abordant la question de la coopération internationale, l’expert en sécurité a rappelé que sur le plan international, le Burkina Faso entretient un certain nombre d’accords avec plusieurs puissances et cela, dit-il, dans plusieurs domaines dont celui militaire. Selon ses explications, le Burkina a, par exemple, des accords avec les États-Unis, la Chine, la Russie, la Turquie, l’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Arabie Saoudite, le Quatar, l’Egypte, la République Tchèque et bien d’autres.
Ces accords interviennent aussi bien dans le domaine économique, alimentaire, humanitaire que dans le domaine militaire, le tout encadré par la charte des Nations unies. Ces accords ont pour la plupart du temps été motivés, de ses dires, par des intérêts d’ordre économiques, liés à la formation militaire, aux équipements militaires et bien d’autres. « Nous avons 19 attachés de défense qui sont basés dans les missions diplomatiques sur les 37 que compte notre pays et nous avons 6 attachés de défense basés à Ouaga. Les autres sont basés ailleurs mais accrédités au Burkina », a-t-il confié.
Se prononçant sur la diversification des partenariats tant réclamée par une frange de la population burkinabè, l’expert en sécurité a indiqué qu’il y a une sorte de « sophisme » ou de « malhonnêteté » qui semble entourer cette question. « C’est soit un sophisme, soit une sorte de malhonnêteté qui existe quelque part. On ne peut plus parler de diversification à partir du moment où on entretient déjà des relations avec ces mêmes pays-là. Certaines personnes disent qu’il faut aller à une coopération avec la Russie. On a déjà une Coopération avec la Russie. On parle de diversification quand il n’y a pas de partenariat dans un domaine donné avec un État donné, sinon cette diversification a eu lieu depuis la chute du mur du Berlin, depuis qu’il a été permis que les États puissent aller chez les rouges même s’ils fréquentent les bleus», a-t-il expliqué. Pour lui, dans le cas de la Russie, l’on pourrait peut-être parler de redéfinition ou de renforcement mais pas de diversification dans le cadre du Burkina Faso.
Parlant de la coopération militaire avec la Russie, celui qui a été plusieurs fois ministre de la sécurité au Burkina Faso, dit ne pas trouver un problème à ce que son pays fasse des commandes de matériels militaires avec la Russie. Pour lui, c’est même normal pour le Burkina de se tourner vers le partenaire qu’il juge capable d’aller dans le sens de ses intérêts . « Même le Niger qui semble être un partenaire dans le cadre du redéploiement du G5 Sahel, un partenaire sûr des français, commande de l’armement avec la Russie. On peut se poser la question où est le problème? », a-t-il soutenu, en indiquant qu’il ne devrait pas y avoir de polémiques quant au fait que le Burkina Faso aille commander du matériel avec Moscou.
Un autre fait en ce qui concerne les manifestations, c’est qu’il y a aussi, d’après lui, de la passion et un certain «infantilisme» au niveau de ceux qui manifestent. Du point de vue du Colonel Barry, les questions de partenariat sont si sérieuses pour un État, qu’il incombe de les prendre avec beaucoup de sérieux. « Les questions de l’Etat à ce niveau là, ne se règlent pas avec une certaine légèreté, le fonctionnement d’un Etat, les questions de choix de partenaires ne se règlent pas au pif. Il faut véritablement une ingénierie pour le faire. Et tous les États en ont. Si notre pays n’en a pas, c’est dommage, mais je pense que nous devons travailler à faire les meilleurs choix possibles », a-t-il confié.
Et pour faire les meilleurs choix, il a proposé des critères de détermination à prendre en compte au titre desquels la question de l’efficacité de l’aide publique au développement et la question du modèle de développement que le partenaire propose.
Le conférencier a aussi relevé des entraves qu’il faut travailler à lever dans le cadre de la coopération géostratégique. Il y a, par exemple, le « paternalisme » de certains partenaires qui laisse percevoir une certaine condescendance. « Quand on voit un ambassadeur qui vient chez nous et qui va poser comme question à un Premier ministre : est ce que vous allez signer avec Wagner? Attendez! Est-ce que ça c’est une question à poser à un Premier ministre ? C’est comme si nous ne savons pas ce que nous faisons», a-t-il regretté. A cela s’ajoute, dit-il, le manque de sincérité de certains acteurs dans la coopération, le manque de vision cohérente ainsi que la question de l’insuffisance de ressources.
Oumarou KONATE
Minute.bf