mardi 12 novembre 2024
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Burkina : Un recruteur terroriste condamné à 21 ans de prison ferme

Le Rôle d’audience de la chambre correctionnelle spécialisée dans la répression des actes de terrorisme sis au Tribunal de grande instance Ouaga II a procédé, le mardi 17 septembre 2024, au jugement des prévenus I. S. et S. D. pour des faits de terrorisme dans la région de l’Est. Le prévenu I. S. a écopé d’une peine de 21 ans de prison ferme et S. D. de 10 ans ferme.

Les prévenus I. S. et S. D. ont comparu devant le Tribunal de grande instance Ouaga II pour répondre de plusieurs chefs d’accusation à eux reprochés. Il est reproché à I. S., les faits d’association de malfaiteurs terroristes, financement de terrorisme, apologie du terrorisme et détention illégale d’armes à feu. À son compère S. D., il lui est reproché les faits d’association de malfaiteurs terroristes et de financement du terrorisme.

I.S., la quarantaine bien sonnée, corpulence moyenne, environ 1,75 m, bonnet blanc sur la tête, d’un teint bronzé, légèrement barbu, pantalon coupé au tibia se présente à la barre avec une grise mine et d’un air inquiet. La chambre procède à la lecture de son procès-verbal (PV). Dans son PV, I. S. confirme son appartenance à un groupe terroriste. Il s’agit du groupe « Laïla Allaha’hou » affilé à Al-Qaïda. Son rôle (le prévenu I.S., ndlr), en tant que maître coranique, était de procéder au recrutement des nouveaux terroristes et de les endoctriner. Dans son procès-verbal, I. S. est clair, précis et limpide. Il donne des informations « concordantes » concernant [son] groupe terroriste : ils sont environ 200 membres dans les opérations terrain ; ils disposent de fusils de guerre et surtout d’un pick-up pris aux mains des eaux et forêts lors d’une attaque. Leur refuge se trouve dans une forêt à l’Est du Burkina Faso. Leur zone d’attaque, les villages de cette partie du Burkina Faso.

Le financement du groupe était assuré par le vol de bétail

Dans ces villages de la région de l’Est, I. S. raconte que les terroristes ont fait irruption pour la première fois, courant 2017, exigeant aux populations de respecter un style vestimentaire en coupant les pantalons jusqu’au tibia, en laissant la barbe poussée pour les hommes et le port obligatoire du voile pour les femmes. Une manière de faire que « lui-même pratiquait déjà », confirme-t-il à la barre.

Recruteur pour le compte du groupe terroriste, I.S. va convaincre S. D. avec qui il partage une dizaine d’années d’amitié à rejoindre le groupe terroriste « Laïla Allaha’hou pour islamiser toute la région de l’Est ».

Selon son PV, I.S. était aussi chargé de la vente du bétail volé par ses « collègues terroristes » ou obtenu par « la zakat » au marché contre rétrocession de la liquidité aux mêmes terroristes. Son compère S. D., lui également était chargé de vendre du bétail pour les terroristes. C’est ainsi, dit-il, qu’est financé les activités de ce groupe terroriste.

Les prévenus entre contradiction et rejet

Après lecture de leur PV, les deux prévenus rejettent tout en bloc. S. D. teint clair, aussi âgé d’une quarantaine d’âge, taille fine, soutien qu’il a effectivement vendu du bétail d’une « connaissance » pour le lui remettre la liquidité, mais qu’il ne savait pas ce dernier était un terroriste. Des ses dires, il s’agissait d’une aide qu’il apportait à cet ami.

Par contre, les déclarations à la barre des deux prévenus est en parfaite contradiction avec celle en enquête préliminaire. « Vous ne dites pas la vérité ! », leur jette au visage le président de la chambre, après les explications du prévenu I. S. à la barre. Peine perdue. I.S. reste ferme dans ses bottes : « Ce que j’ai dit au juge, je me suis trompé. Ce n’est pas la vérité que j’ai dit », se résigne-t-il à avouer tête baissée.

Les terroristes voulaient « d’islamiser » la région de l’Est

Pour le procureur, la mission de ce groupe terroriste était sans ambages : « islamiser » toute la région de l’Est. Pour le procureur, les deux prévenus ne pouvaient pas ignorer leur appartenance au groupe terroriste, puisqu’ils en étaient leurs principaux interlocuteurs chargés des prêches et de faire respecter scrupuleusement les consignes des terroristes sur les populations.

Pour preuve, les deux prévenus ont vécu 3 ans dans cette zone infestée où « personne n’y était » alors que les terroristes s’y rendaient pour remettre du bétail volé.

« L’organigramme qu’ils ont décrit tous les deux devant le juge les condamne. Cela ne peut pas être une pour coïncidence ou une erreur comme ils tentent de le faire croire. Puisqu’ils donnent des détails sur leur nombre et le matériel en leur possession. Lesquelles informations, après vérification auprès des eaux et forêts de la zone, sont avérées », a précisé le ministère public.

« Tous ces détails, ces informations ne peuvent pas être faux. (…) Tous leurs hommes étaient détenteurs d’armes à feu. Mais ils n’étaient pas autorisés à sortir les armes de leur cachette sauf en cas de mission », a confié le procureur.

Pour la partie poursuivante, tous les éléments sont constitués : il y a association de malfaiteurs. Pis, ils ont perpétré des attaques, des assassinats ciblés et des attaques sur les positions des eaux et forêts. « Il n’y a pas de doute du caractère terroriste de leur acte », se convainc le procureur. Il a requis que les deux prévenus soient déclarés coupable des chefs d’accusation à leur encontre. En répression, qu’ils soient condamnés chacun à 21 ans de prison ferme, dont 17 ans de sûreté et 10 millions de F CFA d’amende ferme, conformément aux articles 361-2-3 et 611-2 du code de procédure pénal.

Lire aussi : TGI Ouaga 1 : Un amour de 8 ans qui se termine à la barre

Il faut préciser que les deux prévenus ont été interpellés en 2021, après plusieurs dénonciations des populations de la région. Rappelés à la barre pour leur dernier mot, I.S. et S. D., ont demandé la clémence du tribunal tout en rejetant les faits.

Le Tribunal statuant publiquement, suivant la procédure en matière correctionnelle et en premier ressort, a reconnu les deux prévenus coupables des faits à eux reprochés. Les juges ont condamné I.S. à 21 ans de prison ferme, dont 17 ans de sûreté et une amende de 2 millions de F CFA. Condamné S. D., à 10 ans de prison ferme dont 8 ans de sûreté et 2 millions de F CFA ferme. La chambre a aussi condamné les prévenus aux dépens.

I.S. et S. D., ont 15 jours pour faire appel, s’ils ne sont pas satisfaits de la décision de justice en premier ressort.

Mathias Kam
Minute.bf

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