mercredi 30 avril 2025
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Affaire juge de Banfora : La plaidoirie de Me Farama impose un silence de mort dans la salle

Le procès pour stellionat impliquant le magistrat Sidaty Yoda et ses co-prévenus a entamé la phase des plaidoiries et réquisitions, ce mercredi 30 avril 2025 au TGI Ouaga I. Dans une salle à moitié pleine, l’intervention de Me Prosper Farama, avocat du REN-LAC, a suspendu le temps. Son serment dramatique a imposé un silence de mort parmi l’assistance, comme figée par la gravité de ses mots.

« On a honte ! », a regretté Me Prosper Farama en début de plaidoirie. En effet, l’avocat du REN-LAC s’est dit « gêné » dans cette affaire parce qu’il s’agit du jugement d’un juge. « Mais, je venais avec un espoir, celui de croire qu’on commet tous des erreurs, acteurs de la justice ou pas », a déclaré d’entrée Prosper Farama.

Mais pour l’homme de droit, Me Farama, dans cette affaire opposant le ministère public au juge Yoda et autres, ce n’est pas une simple erreur. « C’est de la pure délinquance. Les faits sont pires que le simple stellionat et le blanchiment des capitaux dont Sidaty Yoda est poursuivi. Il y a du faux dans le dossier. Un juge qui falsifie les décisions de justice, qui falsifie des documents. Qu’est-ce qui nous reste encore comme dignité, nous acteurs de justice ? C’est un escroc comme on peut en retrouver au grand marché et là-bas même encore, c’est moindre. C’est du braquage. Le juge Yoda a même fait une subornation de témoin, c’est-à-dire voir des gens pour aller mentir. (…) Après une trentaine d’années de service, je n’ai jamais vu un personnage aussi malicieux pour brimer ses concitoyens dans l’exercice de ses fonctions. On a honte ! Pourtant, nous devons être fiers de participer à l’œuvre de justice. Même les Burkinabè nous comprennent », a fait observer l’avocat.

Poursuivant dans sa plaidoirie, Me Farama, a indiqué qu’après la honte, il est révolté. « J’ai défendu des grands délinquants qui ont eu des postures différentes en reconnaissant et en restant humble. Voici un délinquant (Sidaty Yoda, ndlr) qui est très arrogant. Il a du mépris même avec ses co-prévenus, parce qu’ayant appris le droit à l’école », a regretté l’avocat du REN-LAC, devant une salle silencieuse.

Revenant aux faits, Me Farama a estimé que le cerveau, c’est bien Sidaty Yoda. C’est le cerveau intellectuel, soutient Me Farama. « C’est lui qui a tout conçu. Les deux co-prévenus ne savent même pas lire. M. Yoda a des compétences intellectuelles », a-t-il fait savoir.

Maintenant sur son implication, Me Farama a fait recours aux propres déclarations du prévenu Sidaty Yoda. Le prévenu a reconnu avoir délivré des ordonnances, des demandes de mutation… Pourtant, ses co-prévenus affirment n’avoir fait aucune requête dans ce sens, a souligné Me Farama, pour qui ces ordonnances n’avaient autre objectif que de faciliter la fraude.

« Faut pas croire que c’est parce qu’on nie les faits qu’il n’y a pas de preuves. Pour un juriste, c’est une erreur, même si c’est un droit de mentir. 20 ans de service, il agit prudemment nous a-t-il dit ici. Il se fout de l’intelligence de tout le monde. Ces ordonnances sont établies intentionnellement en vue de faire de la fraude », a précisé l’avocat de la partie civile.

« Ici présent, son ami (l’ami de Sidaty Yoda, ndlr), a failli être poursuivi. Il affirme que M. Yoda lui a fait établir de faux documents et des fausses déclarations, tout simplement pour couvrir « une autorité (Président du tribunal Yoda, ndlr) », a déploré Me Prosper Farama.

Pour montrer encore plus la culpabilité du juge Yoda, Me Prosper Farama a fait appel au numéro Orange du prévenu Yoda. « Quand vient l’heure de faire parler son compte orange monney, là, il (Sidaty Yoda, ndlr) nous tue tous. Il détient un numéro Orange money qu’il dit utiliser avec des gens. Des personnes qui ont accès à ce compte électronique et il ne peut pas les identifier. Même un délinquant du grand marché se défendrait mieux. Et il espère que cela trouve compréhension auprès de votre juridiction. En 2023-2024, il fait un chiffre d’affaires de 80 millions de F CFA. Je suis curieux de savoir quel juge fait ce chiffre d’affaires », a révélé l’avocat du REN-LAC.

Après avoir démonté faits par faits, Me Farama a demandé à la juridiction de condamner les prévenus Sidaty Yoda, Lamine Tera et Adama Ganamé, tout en tenant compte de la personnalité du juge Yoda. « La personne que j’ai vue ici (parlant de Sidaty Yoda, ndlr), son comportement envers les co-prévenus, il a fait le choix de la délinquance. Si quelqu’un fait ce choix, il faut l’y accompagner. La décision que vous serez emmenée à rendre doit tenir compte de tous ces éléments », a demandé Me Farama.

L’avocat du REN-LAC a terminé sa plaidoirie sur une note d’espoir. « Notre justice traverse des moments difficiles. Nous savons qu’il y a des brebis galeuses dans notre justice. Nous savons aussi qu’il y a de très bons juges et magistrats, et tous les juges ne sont pas corrompus. J’en appelle que la justice soit accompagnée dans ce sens pour qu’elle soit stable. Nous devons donner la réelle image de la justice auprès du citoyen », a-t-il sollicité.

Enfin, le REN-LAC a demandé 1 F symbolique en réparation du préjudice moral et 1 million de F CFA au titre des frais non compris dans les dépens.

Lire aussi➡️Affaire du juge de Banfora : « Il faut rendre justice à la justice » (AJE)

L’audience se poursuit…

Minute.bf

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