« Qui contrôle sa libido, contrôle sa vie », a-t-on coutume d’entendre. Cette maxime, Sieur Kodjo S. (nom d’emprunt) l’a expérimenté à ses depens. Enseignant de profession, par ailleurs, Directeur d’une école primaire à Ouagadougou, il a été condamné ce samedi 10 août 2024, à une peine d’emprisonnement de 5 ans dont 36 mois ferme et une amende de 900 000 FCFA, pour avoir eu des relations sexuelles avec son élève de 12 ans. C’était au tribunal de grande instance Ouaga l.
C’est tête baissée, regard fuyant, que sieur Kodjo s’est présenté à la barre ce samedi. Taille moyenne, cheveux quelque peu ébouriffés, le quarantenaire semble regretter son acte, mais tardivement. Originaire d’un pays voisin, il enseigne dans une école primaire de la place depuis maintenant sept ans. Ses bons résultats lui ont même valu d’être nommé Directeur de cette école.
Les faits qui lui valent de comparaître devant le juge ce matin, se sont produits courant avril 2023. Enseignant, il a eu à cette période, des rapports sexuels avec Kenny T. (nom d’emprunt), l’une de ses élèves en classe de CM2. L’affaire, pourtant gardée bien secrète par les deux, a été découverte en avril 2024, soit une année plus tard, par la mère de la victime qui a aussitôt saisi les juridictions compétentes. « C’est ma sœur qui m’a mis la puce à l’oreille sur le changement de comportement de ma fille. Elle dit l’avoir vue à plusieurs reprises avec un jeune et m’a dit de l’avoir à l’œil. Quand je suis rentrée ce jour-là, je l’ai prise à partie pour savoir si à son âge elle connaissait déjà un homme. C’est là qu’elle m’a avoué que c’est avec son directeur », a relaté,furieuse, la mère de Kenny.
« Moi-même je n’en suis pas fier… »
A la barre, Kodjo n’a pas nié les faits. Mais, il soutient n’avoir eu que deux rapports sexuels avec la victime, son élève. Le premier, affirme-t-il, est survenu « dans un moment de faiblesse », à l’orée des vacances scolaires de 2023. Alors qu’il corrigeait des copies dans une des salles de l’établissement, il affirme avoir appelé la jeune fille pour une partie de révision en préparation des examens du CEPE. Ce serait dans cette salle qu’il l’aurait effleurée. La deuxième fois, dit-il, est également survenue dans l’une des salles de classe de l’établissement « par un moment de faiblesse ».
La voix à peine audible, Kodjo a dit regretter son acte. Se confondant en excuses et en remords, il a avoué n’avoir pas su contrôler ses pulsions et s’être laissé emporter par ses désirs envers la jeune fille. Il a imploré de ce fait le pardon de son élève Kenny, ses parents et surtout, l’indulgence du Tribunal.
« Depuis 2013 que je suis arrivé dans ce beau pays, je me suis toujours évertué à être un bon exemple. Et dans ce sens, j’ai toujours fait de bons résultats en fin d’années. J’ai posé cet acte mais aujourd’hui moi-même je n’en suis pas fier. C’était dans un moment de faiblesse et je voudrais demander pardon à Kenny et surtout à sa mère que j’ai beaucoup blessée », a-t-il fait son mea-culpa.
« J’ai pleuré à chaudes larmes… »
Cette version du prévenu ne coincide pas cependant avec les déclarations faites au parquet par la victime. Interrogée en enquête préliminaire, Kenny a confié, selon le procureur, avoir eu plus de quatre relations sexuelles avec Kodjo. Aussi, d’après les propos de la jeune fille repris par le parquet, ce dernier lui a même sommé après leur premier acte sexuel, de garder le silence, en lui promettant de bonnes notes à chaque fin de trimestre. C’est d’ailleurs ce qui s’est effectivement passé, selon le parquet, puisqu’à la fin du trimestre, la jeune fille est sortie major de sa promotion. Pour le parquet, Kodjo est bel et bien un habitué de ces pratiques même s’il tente de le nier.
Les parents de la victime n’ont rien réclamé en terme de dommages et intérêts. Ils ont toutefois souhaité voir le prévenu être puni à la hauteur de son forfait, pour donner une leçon à tous ceux qui seraient tentés de s’adonner à de telles pratiques sur des mineures. « Moi-même je suis enseignant depuis près de 22 ans. Mais jamais je ne me serais adonné à de telles pratiques. Le jour où sa mère est venue me dire cela, j’ai pleuré à chaudes larmes. C’est pourquoi je m’en remets à votre sagesse, Monsieur le président », a confié le père de la victime, visiblement remonté.
Pour rendre justice à Kenny et à ses parents, mais aussi à toute la société, le procureur a requis que le prévenu soit condamné à 5 ans de prison dont 36 mois ferme et à une amende de 1 million également ferme. Il a rappelé, à but pédagogique, que les dispositions du code penale sont sévères en ce qui concerne de tels faits. Les relations entre enseignants et élèves mineures, dit-il, sont sévèrement punies, peu importe que l’élève soit consentante ou pas.
Le Tribunal a suivi les réquisitions du parquet en condamnant Kodjo S, à 36 mois ferme et une amende de 1 million FCFA également ferme. Le prévenu, perçu comme un danger public, est également interdit d’exercer la profession d’enseignant pour une durée de 5 ans, avec une contrainte d’exécution de 03 mois.
Il lui a néanmoins été concédé 15 jours pour faire appel de cette décision s’il ne l’approuve pas.
Oumarou KONATE
Minute.bf
Très touchant merci pour la belle rédaction