Le vendredi 04 mars 2022, ils étaient à la barre de la chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Ouagadougou pour répondre des faits à eux reprochés. Eux, ce sont Moussa, Hamado et Issouf (des noms d’emprunts). Ils doivent répondre des faits « d’accusation d’ébat sexuel en plein air, des menaces de morts et d’avoir porté atteinte à l’honneur et l’intimité » suite à une plainte de Boukaré (nom d’emprunt).
Les faits se sont déroulés dans une commune située dans les encablures de Ouagadougou. Moussa, Hamado et Issouf, membres d’une même famille ont tenu une réunion familiale et à l’issue de cette réunion ils ont arrêté que Boukaré a eu des rapports sexuels en plein air avec leur femme Mariam (nom d’emprunt), une veuve mère de six enfants. Et comme sanctions prises au cours de la réunion, Boukaré est désormais interdit de mettre pied au marché mais aussi à la mosquée du village. Quant à Mariam, elle est désormais interdite de rentrer en contact avec tous ses enfants et même formellement interdite de recevoir ou de donner quelque chose à son premier fils.
Après ce rappel des faits, viennent les questions du tribunal:
-Est-ce que vous reconnaissez les faits? demande-t-il à chacun des accusés. Les réponses seront affirmatives.
-Est-ce que vous avez été témoins de la scène (la partie des jambes en l’air entre Boukaré et Mariam) ? Les réponses seront encore non. Aucun d’eux n’a été témoin.
-Mais quels sont vos témoins qui sont venus vous raconter la scène ?
Un accusé prend la parole et explique que ce sont des jeunes qui ont fait leur kermesse la nuit et sont venus leur dire le lendemain que Boukaré et Mariam ont entretenu des relations sexuelles en plein air. Des commerçants également auraient été témoins de la scène, selon cet accusé.
- Est-ce que vous pouvez nous citer nommément un témoin ? La réponse est non.
-Est-ce que vous reconnaissez avoir menacé Boukaré de ne plus venir au marché et à la mosquée? Enchaîne le procureur. Tous les accusés répondent par l’affirmatif et soutiennent que c’est une décision familiale.
« Boukaré ne m’a jamais dragué ni couché avec moi »
Après cette confrontation entre le parquet et les accusés, place maintenant aux plaignants de donner leurs versions des faits. A ce niveau, le tribunal reprend ses questions :
-Est-ce que vous reconnaissez avoir entretenu des rapports sexuels avec Boukaré? lance-t-il à Mariam.
« Non. J’ai expliqué le jour de la réunion que Boukaré ne m’a jamais draguée ni couché avec moi. »
La même question est posée à Boukaré par le tribunal et voici son témoignage :
« Je ne l’ai jamais draguée. La nouvelle m’a surpris, je suis allé expliquer le problème au chef du village et ce dernier m’a conseillé d’aller à la gendarmerie. La femme en question, je ne lui ai jamais serré la main. C’est une fois j’étais de passage, elles étaient assises en groupe et je les ai saluées en passant ».
A l’issue des interrogations avec les accusés tout comme avec les victimes, le tribunal reprend la parole et déplore le fait que Moussa, Hamado et Issouf aient pris des décisions à l’encontre de Boukaré et Mariam sur la base des rumeurs parce que n’ayant pas de preuves de leurs accusations.
Le procureur prend la parole à son tour également et demande aux accusés s’ils pensent réellement qu’il y a eu des rapports sexuels entre Mariam et Boukaré. Chacun se contentera de dire qu’il n’a pas été témoin donc difficile de confirmer.
Lui également a aussi déploré le fait que, sur des rumeurs, les accusés chassent une veuve mère de 6 enfants, rompent les liens avec ses enfants, interdisent leur frère de venir à la mosquée et au marché. Il a ensuite déclaré les 3 accusés coupables des infractions de diffamation, de pression morale et de menace sous pression. Il a alors requis la peine d’emprisonnement de 12 mois et une amende de 500 000 FCFA, le tout assortit de sursis contre Moussa, Hamado et Issouf. Ils sont également sommés par le procureur de réintégrer sans délai la femme auprès de ses enfants.
Comme réclamation, dame Mariam a souhaité tout simplement être réintégrée auprès de ses enfants.
Le sieur Boukaré par la voix de son avocat a demandé 10.000 000 FCFA au titre de dommages et réparations.
Le dossier a été mis en délibéré pour le 25 mars prochain par le tribunal. Il précisera également que la décision sera tributaire de ce qu’ils feront de dame Mariam et Boukaré avant le 25 mars 2022.
Mouni Ouédraogo
Minute.bf