Il a été pris dans le ghetto en pleine consommation de drogue. En compagnie de plusieurs consommateurs de drogues, lui n’a pas pu échapper aux flics qui avaient fait une descente musclée dans le ghetto pour les arrêter et démanteler les différents réseaux de trafiquants de drogue. Il a été appréhendé avec 6 cristaux de Cocaïne appelés dans leur jargon « Cailloux », et 36 kilogrammes d’héroïne. Devant le juge ce 14 octobre 2021, deux chefs d’accusation pèsent sur lui: vente de stupéfiants et consommation de drogue. Lui, c’est Justin (nom d’emprunt).
Du haut de ses 1m80, il se tenait devant le juge, la tête rasée à ras, frêle dans sa chemise manche courte, il avait presque la peau sur les os. Son cou décharné aux tendons rebondis reliait son tronc à sa tête presque squelettique.
« Reconnaissez-vous les faits qui vous sont reprochés? », lui demande le juge qui avait pris le soin de lui citer les charges qui pèsent sur lui. « Je ne reconnais que la drogue qu’on a pris sur moi; les six cailloux que la police a pris sur moi », a répondu Justin, faisant allusion aux cristaux de cocaïne qu’il avait dans ses poches lorsqu’il a été arrêté par la police nationale.
« Pourtant vous avez été appréhendé avec plusieurs kilogrammes d’héroïne également », lui rétorque le juge. « Oui, Monsieur le juge, mais ce n’est pas pour moi. D’autres personnes ont fui en abandonnant leurs drogues là où j’ai été arrêté. La preuve, quand la police m’a arrêté, l’héroïne de kilogrammes était éloignée de moi. Ce que je reconnais, ce sont les 6 cailloux de cocaïne qu’ils ont trouvés sur moi », a-t-il insisté dans un langage entrecoupé, accompagné de gesticulations incessantes. Il faut dire que Justin avait même du mal à s’arrêter longtemps sans gesticuler.
Puis vient le tour du procureur de lui poser des questions. « Vous consommez la drogue depuis combien de temps? », lui demande le procureur. « 3 ans », répond Justin sans trop d’hésitation. « La drogue que vous consommez, vous savez ce que c’est? », questionne encore le procureur. Et à Justin de faire savoir que tout ce qu’il sait, c’est que c’est une drogue appelée cailloux dans le jargon. Et au procureur de l’informer qu’il s’agit en réalité de cocaïne cristallisée.
« Cette drogue, le caillou dont vous parlez coûte combien? Comment arrivez-vous à vous en procurer? Vous devez être un vendeur, sinon vous ne pouvez pas vous en procurer », assène le procureur.
« Je ne suis pas un vendeur. J’étais sur les lieux pour consommer et c’est là que la police nous est tombée dessus », explique-t-il toujours. Pour ce qui est du prix de la drogue, il fait comprendre au juge qu’un caillou coûte 2500 FCFA et pour leur consommation, ils s’associent pour s’en procurer. « Je m’associais avec une prostituée pour acheter la drogue. On cotisait 1250 FCFA chacun pour acheter. Par moment elle achetait pour notre consommation », a-t-il expliqué au procureur.
Curieux d’en savoir plus, le procureur lui demande comment il arrive à consommer ce caillou dont il parle étant donné que c’est un solide? « Nous avons des pipes professionnelles dans lesquelles nous mettons de la cendre avant d’y mettre le caillou. Par la suite, on chauffe le caillou pour inhaler le gaz qui en résulte », a-t-il expliqué dans le détail au procureur.
Renseigné sur les contours de l’affaire, le procureur conclut en suggérant au juge de relaxer le prévenu pour le fait de vente de stupéfiants. Mais qu’il soit retenu coupable du fait de consommation de drogue. « L’idéal c’est de le garder un bon moment en prison. Cela va lui permettre d’arrêter la consommation de la drogue », a conseillé le procureur au juge.
Le juge, avant de dire son dernier mot, a donné la parole à Justin pour sa réaction sur les réquisitions faites par le procureur.
« J’avais arrêté la drogue à un certain moment quand j’étais libre. Je peux encore le faire. Je veux être libre. Je veux être utile pour la société. Je veux travailler pour payer la scolarité de mon enfant », a-t-il plaidé.
Le juge lui a alors prodigué quelques conseils. « Vous avez quel âge? « , lui demande le juge. « Je suis né en 1986 », répond-il laissant toute la salle ahurie. L’homme visiblement avait l’air d’un personnage de 50 ans. « Vous voyez, vous êtes jeunes pourtant vous avez l’air vieux. Et dans la salle aucun membre de votre famille n’est là pour vous assister. Ce sont les effets de la consommation de drogue », lui souligne le juge, conseillant donc à l’accusé de mettre fin à la consommation de la drogue.
Le juge a terminé en prononçant une peine d’emprisonnement de 24 mois dont 12 mois ferme à contre Justin. « On espère que durant ce temps que vous allez passer en prison vous aurez le temps de vous débarrasser de vos cailloux et de ne plus en être dépendant », a conclu le juge.
Hamadou Ouédraogo
Minute.bf
