Depuis le 12 septembre 2018, le Ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de l’innovation (MESRSI) a opté pour une digitalisation des services universitaires au Burkina Faso, à travers la plateforme campusFaso. Pour s’inscrire, demander une chambre en cité où encore avoir accès aux services du Restaurant universitaire (RU), il faut dorénavant passer par cette plateforme. L’usage de ce nouveau système nécessite cependant une certaine maîtrise. Ce qui n’est pas donné à tous les étudiants. Pour venir en aide à leurs camarades et les assister dans les différentes procédures, ils sont nombreux ces étudiants qui se sont improvisés facilitateurs et qui, par là, se sont concomitamment découverts un métier en parallèle à leurs études universitaires. Reportage !
Plus jamais de « il faut serrer le rang!». Finis les « pas d’intégration ! » (non respect de l’ordre d’arrivée, ndlr). Révolues les longues files sous le chaud soleil de l’université de Zogona ! Les services universitaires sont presque tous désormais digitalisés. Il vous suffit donc désormais, de disposer d’un smartphone Android, d’une carte SIM et d’une connexion Internet et le tour est joué. Vous avez accès à presque tous les services du système universitaire burkinabè. Une aubaine, un ouf de soulagement pour nombre d’étudiants qui voient ainsi une grande partie de leurs peines soulagée.

Mais, si l’avènement de ces nouvelles procédures peut être d’un grand bénéfice, leur maîtrise et leur usage demeure un véritable casse-tête pour les universitaires. La plateforme campusFaso n’est pas aisée d’usage pour tous. Les nouvelles technologies en elles-mêmes sont un mystère pour bien d’étudiants. C’est là que les facilitateurs interviennent.
Pour apporter de l’aide à ses camarades, Kader Zongo, étudiant en Licence 3 de Lettres Modernes à l’université Joseph Ki-Zerbo, n’a eu besoin que d’un banc, une pancarte sur laquelle on peut lire : « Inscriptions, Dépôts en ligne ». Son téléphone (smartphone) et une connexion internet viennent compléter son kit de travail. Son matériel sorti, il propose différents services à ses camarades dans l’enceinte même de l’Université Joseph Ki-Zerbo. « Ce que je propose aux étudiants, ce sont des services d’assistance sur les différentes plateformes d’inscription en ligne initiées par le ministère de l’enseignement supérieur, notamment campusFaso : les demandes de bourses, d’orientation, les dépôts des aides FONER et tout ce qui est relatif aux demandes des chambres dans les cités universitaires », détaille-t-il.

Chez Kader Zongo, le déclic de cette entreprise est parti de sa première inscription en ligne. En effet, il fait partie des premiers étudiants à s’être inscrits en ligne au lancement de la plateforme en 2018. « Je me suis lancé dans les inscriptions en 2019, suite à l’annonce du ministère qui demandait à l’époque aux étudiants de se faire enregistrer sur la plateforme campusFaso. J’étais parmi les premiers à avoir pu le faire seul, sans assistance. J’ai trouvé une aisance à le faire alors que beaucoup avaient des difficultés. Beaucoup d’étudiants se plaignaient trop donc je me suis dit : pourquoi ne pas les aider ? », révèle-t-il sur ses motivations.
Pour se doter en connexion et satisfaire sa petite clientèle, l’étudiant Zongo demande une somme forfaitaire de 1000 F pour les étudiants désirant s’inscrire pour le Bac national et 2000 F pour la section Bac étranger et les étudiants du niveau Master et plus. Ci-fait que quand viennent les inscriptions, les recettes journalières varient entre 10 000 F CFA et 15 000 FCFA.
Comme lui, Samuel Traoré également étudiant en 3e année de lettres modernes à l’Université Joseph Ki-Zerbo offre aussi les mêmes services que son compaire Zongo. De la création de l’Identifiant National Étudiant (INE) aux inscriptions en ligne, l’étudiant propose de nombreux services à ses camarades. Et il se démêle tant bien que mal pour satisfaire la demande puisqu’il est beaucoup sollicité.

Si certains peuvent percevoir dans ce qu’il fait des fins lucratives, Samuel Traoré lui, le perçoit comme du volontariat. C’est, dit-il, une manière pour lui de voler au secours de ses camarades qui ne maîtrisent pas la plateforme. « Comme c’est entre nous camarade, il y a des tarifs qui peuvent être revus à la baisse. Sinon le minimum, c’est 1000 F CFA. Nous prenons en compte toutes les universités du Burkina pour nos services », a-t-il fait savoir.
Ollo Paul Kambou, également étudiant à l’Université Joseph Ki-Zerbo, a plusieurs fois recouru aux services de ces « jeunes facilitateurs ». C’est donc en toute reconnaissance qu’il salue leur initiative sur le campus. « Ce qu’ils font est vraiment une chose louable. S’ils ne s’étaient pas donnés à cette tâche-là, j’imagine comment les gens allaient se débrouiller puisqu’il y a beaucoup d’étudiants qui ne maîtrisent pas les inscriptions et la façon dont ça se passe », apprécie-t-il.

Une autre chose à saluer, selon Kambou, c’est le tarif des prestations. La somme forfaitaire de 1 000 F CFA souvent exigée est, de son avis, un « prix étudiant », pour ne pas dire abordable. « Je trouve cela très abordable parce qu’ils peuvent souvent passer plus d’une heure sur un dossier et au finish, c’est 1000 F CFA que l’intéressé paye. Souvent même, ils déposent pour des gens sans prendre l’argent et c’est quand le foner tombe que la personne fait un geste. Mais des fois, il y a d’autres même qui ne reviennent plus », explique-t-il tout en souhaitant que les autorités universitaires canalisent ces jeunes pour les outiller davantage à travers différentes formations en vue de leur permettre de poursuivre leurs actions sur les différents campus universitaires.
En attendant que le souhait de Kambou se réalise, ces jeunes facilitateurs de la plateforme Campusfaso se disent confrontés à un problème majeur. En effet, disent-ils, depuis quelques temps, ils sont sommés par les autorités universitaires de déguerpir de l’enclave universitaire. Ils en appellent donc à l’indulgence et à la bonne compréhension pour continuer à porter assistance à leurs camarades.
Jean-François SOME (Stagiaire)
Minute.bf
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