mercredi 4 décembre 2024
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Burkina : Salif Tarpaga, « l’enseignant fou » du Sahel aux exploits non reconnus

Cela fait 9 ans qu’il est dans la fonction publique burkinabè. Il a embrassé « par vocation » le métier d’enseignant. Il y est intégré en tant qu’instituteur adjoint certifié. Il est présentement instituteur certifié, servant dans la région du Sahel, dans le Yagha, précisement à Boundoré, localité située à 400 kilomètres de la capitale. Salif Tarpaga, puisque c’est de lui qu’il s’agit, porte le nom de « fou » par les populations de Boundoré vu son engagement hors limite à dispenser le savoir aux enfants sahéliens. « A chaque fois que l’on l’aperçoit on l’indexe en ces termes : ‘’voilà le fou qui passe’’ », nous glisse un habitant de Boundoré vantant les exploits de Salif Tarpaga, le ‘’fou’’ qui a réalisé un taux de 100% de succès avec ses élèves au CEP. Et c’est à partir de là que minute.bf a décidé d’aller à la rencontre de celui qui est sur les bouts de lèvres des parents d’élèves de Boundoré. Celui qui, malgré ses sacrifices, n’a reçu aucun encouragement de sa hiérarchie encore moins de son ministère de tutelle, coule les derniers jours de ses vacances à Kaya avant de remonter dans quelques semaines « au front ».

« Il y a eu beaucoup d’attaques vers nous. Au début, il y avait des tentatives d’intimidation. Grâce à Dieu, j’ai pu résister et je me suis organisé avec les élèves pour travailler ». Ces mots sont de l’enseignant « fou » de Boundoré, Salif Tarpaga. Pourquoi malgré cette situation, a-t-il réussi à atteindre son objectif en réalisant un de succès de 100% au CEP 2019 ?


« Je faisais venir les enfants parfois à la maison… »


« La situation sécuritaire à Boundoré n’est pas stable. Cette année, il y a eu seulement deux écoles qui ont présenté des candidats au Certificat d’étude primaire (CEP). Alors qu’il y a environ 30 écoles. C’est donc pour dire que, vu la situation sécuritaire, les autres écoles ont été fermées. La sécurité là-bas est inquiétante. Rien qu’avant-hier (Ndlr ; 31 août 2019) mon IP (instituteur principal) a appelé pour m’annoncer que des individus armés non identifiés ont cassé la cantine scolaire. Je ne connaissais pas de samedi ni de dimanche. Je faisais venir les enfants parfois à la maison. Même la nourriture, c’est ma femme qui leur préparait à manger. J’ai tout fait. J’ai même dispensé des cours la nuit. », nous a-t-il expliqué, avant de confier qu’il a présenté 18 candidats au CEP, tous admis. Il a précisé qu’il disposait au départ de 16 élèves et 2 autres sont venus à lui comme auditeurs libres et à l’heure de la moisson, tous les 18 ont été admis à leur examen.

Des exploits qui n’ont pas franchi les limites de Boundoré

Avec un taux de réussite de 100% dans un tel contexte, l’on suppose que logiquement, l’enseignant Tarpaga a dû recevoir les lauriers des autorités du pays. Lorsque la question lui a été posée, c’est avec stupéfaction que nous apprenons de l’intéréssé, lui-même, que ses exploits n’ont même pas retenu l’attention des autorités. Sa satisfaction morale relève tout juste de la reconnaissance que lui ont témoigné les parents des élèves. « Je n’ai même pas reçu un message d’encouragement ni de félicitations. Rien. Est-ce-qu’on a su même que j’existe ?… », s’est ému le « pauvre » enseignant.

Aperçu de l’école de Boundoré, dans le Sahel

Malgré ses efforts non reconnus et la situation sécuritaire dégradée, le ‘’fou’’ de Boundoré n’entend pas baisser les bras. Mieux, il rejoindra son village perdu dès la rentrée 2018/2019.

« Je repartirai… »

« Moi, je n’ai pas peur. Je repartirai », nous a-t-il confié. A la question de savoir s’il ne craint pas pour sa vie, notre interlocuteur répond : « J’ai peur pour ma vie, mais la vocation m’appelle. J’ai juré de donner le savoir aux enfants. Tant que l’école n’est pas officiellement fermée, j’irai là-bas ». Pour lui, même si les autorités ne reconnaissent pas ses efforts, Dieu lui, au moins, lui est reconnaissant car, ‘’il est juste’’. « Avec mes maigres moyens, j’ai fait ce que je pouvais faire. Je remets tout entre les mains de Dieu. Je considère les élèves comme mes propres enfants », soupire-t-il.

Des corrections d’indemnités de 2012 toujours en souffrance

Lorsque nous lui demandons s’il n’a pas de regrets de s’être sacrifié de la sorte sans aucune forme de félicitations de la part des premiers responsables de son département ministériel, Salif Tarpaga répond par la négative. « Non », nous a-t-il répondu tout laconique. Tout de même, il nous a fait des révélations, seuls motifs de régrets. Depuis 2012, l’année à laquelle il a intégré le corps enseignant, ses dossiers ne sont toujours pas corrigés. Il se contente toujours de son « salaire de base ».

« Là où moi je regrette c’est que depuis que j’ai déposé mes documents de corrections d’indemnités cela n’est toujours pas fait. Depuis 2012, je ne touche que mon salaire de base. J’endure cette situation depuis 9 ans. Je suis rentré dans le corps en tant que IAC et maintenant je suis IC. Toujours rien n’est corrigé. On ne m’a pas encore reproché un problème quelconque lié à mes dossiers », a révélé, l’air hagard, cet enseignant au courage et à l’engagement for exceptionnels.

Par Lassané SAWADOGO
Pour minute.bf

24 Commentaires

  1. Félicitations et courage à Tarpaga. Merci à minute.bf pour cet article interpellateur.
    Cependant ma critique est le fait que vous avez exposé tous les coordonnées et identités de l’enseignant alors que vous savez que le problème sécuritaire existe dans la localité. Tenez compte souvent des paramètres sécuritaires dans vos écrits. Il ne faut pas exposer les gens. Merci.

    • C est exactement la remarque j allais faire.c est bien de nous faire connaître et ses mérites mais vous l avez vendu, excusez ce terme. Franchement vous auriez dû le protéger. Le ministre Waro est interpellé.
      Félicitations fils et que Dieu vous garde

  2. Le magasin de la cantine scolaire de Boundoré n’a pas été violé.
    Il y’a eu des mouvements suspects dans d’autres écoles de la ceb et l’ordre fut donné de distribuer les vivres restants.
    Minute.Bf a mis à nu l’identité de l’enseignant sans tenir compte de la situation sécuritaire.
    Il était aussi mieux après interview de l’enseignant, interroger son directeur, son Cceb et même autres autorités compétentes pour voir si quelque chose n’est pas préparée pour récompenser tous les efforts de ceux qui se sont donné corps et âme.
    Merci pour ce que vous faites pour qu’on reconnaisse les différents mérités.

  3. Félicitations à vous ! Vous êtes un exemple à suivre. Cependant il faut qu’ils pensent à vous affecter dans une autre localité. Vu qu’à présent vos coordonnées et votre identité sont révélés.que Dieu vous bénisse et vous protège.

  4. Bravo au journal minute.bf. vous avez révélé au Burkinabe un heros perdu. Il appartient au ministre de le recompenser. Et ensuite le réaffecter. Ceux qui critiquent minute sont les defenseurs de l’injustice. Ils naiment pas la verité. Des larbins. Dan’s dautres pays cet enseignant serait reçu par le president su Faso

  5. L’information est osée mais non équilibrée. Ni son directeur, ni le cceb n’a été entendu. Vous avez vendu moins cher l’impétrant sans le vouloir. Veuillez prendre les disposituons pour sécuriser sa vie. Quant à lui je lui recommande fortement de ne plus s’y rendre. Aussi il est inadmissible qu’après 9ans de service aucune de ses indemnités ne soit corrigée. Il est en partie responsable, Personne ne viendra les lui corriger. Il faut qu’il s’active lui même.

  6. Bravo, M. L » Enseignant fou. La passion, meme celle pour son metier, est aussi de la folie. Mais je ne sais pas si c » etait le moment d » ecrire cet article. Toutes mes felicitations tres sinceres.

  7. Moi je ne conseille pas la hierarchie de cet enseignant de le laisser aller a son poste de Boundore. Il est maintenant expose et sa vie et celle de sa famille peuvent etre menacees. Pardon, envoyez-le encore a quelque part meme si c’est toujours dans le meme CEB dans l’anonymat pour continue son succes. Ces « fous de Dieu » peuvent attenter a sa vie. Il est trop expose maintenant. Merci

  8. Malheureusement, nos autorités n’encouragent et félicitent la médiocrité. Ceux cencés avoir de la reconnaissance, sont laissés pour compte. J’admire ton courage et ta combativité ! Beaucoup de courage car travailler sans salaire n’est pas chose aisée.

  9. C’est cela qu’on appelle sacerdoce. Le cas de TARPAGA est révélateur d’une gouvernance chaotique et inique du personnel enseignant. Sinon comprendre que ce jeune malgré sa dévotion pour les enfants du peuple n’ait reçu aucune reconnaissance de la part de sa hiérarchie ni une attention particulière sur la gestion de sa carrière. Et pendant ce temps, on décore des absentéistes et des détourneurs à tour de bras sur la base de simples affinités parce que il y a des échelons à glaner. Hélas! Malheureusement, des « Tarpaga » il en existe qui évoluent dans le silence de leur amertume.
    Bravo mon fiston! l’histoire te réhabilitera et que d’abord, Dieu te protège.

  10. Je salue son courage, bravo! mais je demande aux autorités en plus de devoir reconnaître ses efforts, de penser à affecter ce monsieur en ville ( à Ouaga par exemple), car il est déjà exposé.

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