samedi 28 juin 2025
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Birmanie : La junte divise les grandes puissances

Aung San Suu Kyi, Prix Nobel de la paix est renversée du pouvoir le 1er février 2021 par des militaires putschistes du pays aux mille pagodes. A ce jour, plus de 600 morts selon l’émissaire de l’ONU pour la Birmanie. Myanmar met à mal la communauté internationale plus que jamais divisée sur la question. 

La Junte militaire s’est emparée du pouvoir le 1er février 2021 et Aung San Suu Kyi est assignée à résidence. La démocratie birmane n’aura duré que 10 ans. La classe politique et civile birmane farouchement opposée à ce coup d’Etat continue de battre le pavé. La riposte manu militari est sans pitié et sanglante. Cette attitude militaire a créé un tollé international. La communauté internationale se contente de sanctions qui jusque-là sont comme un coup d’épée dans le fleuve Sittang. Le retour de la démocratie est pour l’instant le pire exercice  cauchemardesque envisageable par la Junte.

Retour sur l’évènement du 1er février à Myanmar 

Cette journée du 1er février est marquée de prime abord  par une série d’interpellations et d’arrestations dont la cheffe du gouvernement civil, Aung San Suu Kyi, et le président de la République Win Myint. Ainsi, Min Aung Hlaing, le « dinosaure » chef  de l’armée, concentre-t-il désormais les pouvoirs « législatif, administratif et judiciaire », tandis qu’un autre général, Myint Swe est désigné président par intérim. Par ailleurs, à Rangoun, la plus grande ville du pays, un blocus est mis sur l’hôtel de ville, l’aéroport, et l’état d’urgence est décrété par l’armée régulière, les Tatmadaw. L’annonce est faite sur leur chaîne de télévision Myawaddy. Mais qu’est ce qui choque autant des manifestants très remontés contre les Tatmadaw ?

Le processus démocratique birman appartient désormais à l’histoire 

De  son indépendance en 1948, cette ancienne colonie britannique est à son troisièmement coup d’Etat. Le pouvoir de 1962 à 2011 était l’apanage des soldats. Sa transition démocratique tumultueuse est morte dans la fleur de l’âge. La jeunesse birmane et les partisans de la Ligue Nationale pour la Démocratie(LND), parti de Aung San Suu Ky redoutent les années lugubres et autoritaires d’autrefois. L’organisation fébrile des opposants dans les rues espère une réaction forte de la communauté internationale.  Depuis leur forte mobilisation par milliers le 06 février dernier. Jusqu’ à nos jours des voix les plus audibles se lèvent sans effets majeurs. Des raisons immédiates, inhérentes à ce coup de force méritent un déballage.  

Les raisons avancées par la Junte sur leur opération

Le pouvoir de l’armée est mis à dure épreuve lors des élections de novembre 2020. Ce revers politique est une pilule amère. Min Aung Hlaing, commandant en chef, du pouvoir de l’armée dénonce des fraudes électorales. Il demande la  vérification des listes et un nouveau décompte des voix, ce que refuse la commission électorale. Les résultats sont révélateurs du malaise profond de la grande muette

Selon l’AFP Aung San Suu Ky dans l’ensemble des assemblées obtient 61 sièges de plus que pendant la législature précédente : 138 à la Chambre Haute (Amyotha Hluttaw, Chambre des Nationalités, 258 à la Chambre basse (Pyithu Hluttaw, Chambre des Représentants) et 501 aux Chambres des États (Pyi Ne) et des Régions (Taing Detha Gyi). Son principal adversaire, soutenu par l’armée, le Parti de l’union, de la solidarité et du développement (USDP), ne récolte que respectivement 7, 26 et 38 sièges. Une moisson inespérée. Les allégations  soldatesques ne se limitent  pas aux résultats litigieux. 

La Prix Nobel de la paix, adulée par les occidentaux est accusée par la junte de délits mineurs : importation illégale de talkies-walkies et non-respect des restrictions liées au corona virus. A cela s’ajoute l’incitation aux troubles publics et la violation d’une loi sur les télécommunications. Quand on veut noyer son chien on l’accuse de rage dit-on. 

Les raisons lointaines du putsch

Aung San Suu Kyi, a voulu durant ces dernières années manger au fruit défendu de son pays. Il faut noter qu’une constitution birmane datant de 2008 interdit à tout citoyen ayant épousé un étranger ou ayant des enfants étrangers de devenir président. Cette clause avait été spécialement créée sans doute pour empêcher les ambitions de la dissidente Aung San Suu Kyi, qui a été mariée à un Anglais. Elle en a fait de cette loi discriminative et non représentative du peuple selon elle et ses partisans son cheval de bataille. 

En 2O15 son parti a tenté en vain la modification de la constitution afin qu’elle soit présidente. Les militaires disposaient d’un quota énorme  de député qui a fait front au LND. Des centaines de personnes avaient marché le 27 février 2019 pour le changement de cette constitution. En effet  Les résultats des élections de novembre 2020 largement en faveur du LND aurait facilité le saut du verrou de cette constitution. Les intérêts géopolitiques dans ce triangle d’or sont très importants. Il faut donc avoir l’art de l’anticipation.   Les réactions des grandes puissances se heurtent et ragaillardissent les putschistes.  

Miroir aux alouettes, les sanctions et condamnations des grandes puissances 

Les sanctions qui ont suivi après la chute du LND au pouvoir sont allées vite mais sans incidents singuliers sur la junte. L’ONU par son Sécrétaire général Antonio Guterres a fermement condamné le coup d’Etat et annoncé des sanctions. Jen Psaky, le porte-parole des Etats-Unis, Boris Johnson, le Premier ministre du Royaume-Uni ainsi que plusieurs Etats ont condamné fermement ce coup d’Etat jusqu’à nos jours. Par contre les militaires profitent du soutien indéfectible de leurs alliés russes et  chinois. Ces derniers ont usé de leur veto contre des sanctions à l’endroit de l’armée le 31 mars dernier au conseil de sécurité de l’ONU.  La Chine appelle à la désescalade tout même. Mais Moscou  est stricte et entend renforcer ses échanges militaires avec la Birmanie. La Prix Nobel de la paix subit-elle le Karma ?

Aung San Suu Kyi complice du génocide contre les Rohingyas

Aung San Suu Kyi, est belle et bien complice du génocide des Rohingyas. La Birmanie est un pays à 90% Boudhiste. Les Rohingyas, peuple minoritaire, musulman, et apatride de l’Etat de Kakhine à l’Ouest du pays a été décimé. Des cas de viol, déshumanisation, confiscation de terres et d’autres actes sont exécutés sous l’indifférence de la ‘‘lady’’ de la paix. 

À quatre reprises, depuis 1978, l’armée birmane s’est attaquée aux villages rohingyas, semant la désolation et poussant des centaines de milliers d’entre eux à fuir vers le Bangladesh voisin. Ces épisodes récurrents de répression sont survenus en 1978, en 1991, en 2012, puis en 2016 et en 2017. Les alibis ont toujours prévalu en Birmanie pour tuer la minorité musulmane. 

 En fin août 2017 l’armée birmane affirmait que les rebelles Rohingyas ont attaqué des postes de polices. En réponse à cette attaque, une réponse sanglante et meurtrière s’en est suivie.  En un mois, plus de 6 700 Rohingyas sont tués, selon Médecins sans frontières (MSF).

En rappel c’est en   1982 que le gouvernement birman a retiré leur citoyenneté aux Rohingyas, les transformant en un peuple d’apatrides. « Elle (Aung San Suu kyi) est carrément complice des exactions qui leur(les Rohingyas) sont infligées », accuse le militant et chercheur d’origine birmane Maung Zarni. Il ne fait pas dans la dentelle

« Non, l’État de Rakhine, où vivent les Rohingya, n’est pas la proie d’un simple conflit entre deux groupes ethniques. Ce qui s’y passe depuis presque quatre décennies relève d’une lente tentative d’exterminer un peuple » affirme-t-il. Maung Zarni ex admirateur de la Prix Nobel reproche en effet à ses compatriotes bouddhistes d’ignorer les Rohingyas ou de les voir à travers une lunette islamophobe.  Quelle est l’importance d’un Prix Nobel de la paix quand on est incapable de dénoncer des crimes perpétrés contre ses propres concitoyens encore moins de les condamner?

L’accusation de génocide n’apparaît qu’en mars 2018. La rapporteure spéciale des Nations unies sur les droits humains en Birmanie, Yanghee Lee, évoque alors des « crimes [portant] les marques d’un génocide ». Et ce n’est qu’en décembre de la même année qu’Aung San Suu Kyi,  Prix Nobel de la paix en 1991, sort de son silence et défend l’armée. L’armée birmane a peut-être fait usage d’une « force disproportionnée », mais jamais avec une « intention génocidaire », déclare-t-elle devant la Cour internationale de justice. 

 Les Prix Nobel sont attribués depuis 1901 dans plusieurs domaines pour récompenser divers acteurs dans le monde. Au regard des exactions faites aux Rohingyas  sous Aung San Suu Kyi, c’est le lieu de se pencher un peu sur la nécéssité de ce prix qui suscite une vive polémique. L’armée va-t-elle encore se laisser entrainer dans un processus démocratique ?

Regtoumda Abdou Racisse (Correspondance particulière)

Minute.bf

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